Le rally des marchés actions américains à la fin de la semaine dernière a permis aux indices boursiers d'effacer quasiment l'intégralité de leurs pertes enregistrées ces dernières séancesi. Nous avons justement observé des chandeliers japonais vendredi soir qui semblent remettre en cause les perspectives de baisse sur Wall Street. En effet, ces chandeliers ayant de longues mèches basses peuvent être considérés comme des pré-signaux haussiers avant une nouvelle relance des Bourses mondiales à l'approche de la fin de l'année.
Une simple analyse graphique de l'indice S&P 500 montre que le rally à la fin de cette semaine se produit après un test positif d'un canal haussier de long terme. Tout analyste technique doit reconnaître le fait que le marché pourrait avoir effectué un point bas de moyen / long terme sur ce support d'importance.
Est-ce qu'il faut revenir à l'achat sur le marché actions ?
En août, suite à la première correction conséquente sur les marchés boursiers, j'avais évoqué un scénario de rebond avant de voir le S&P 500 corriger à nouveau avec un objectif potentiel à 1.810 points, soit les plus bas d'avril. Cette cible a failli être atteinte cette semaine.
Aujourd'hui, nous nous trouvons dans une situation très similaire que celle en août. Le marché a corrigé fortement ces dernières semaines, et le S&P 500 se stabilise sur un support historique. A première vue, les investisseurs n'ont rien à craindre car la tendance haussière du S&P 500 est toujours préservée.
En revenant sur ce que j'ai dit en août, lorsque j'ai souhaité bonne chance aux acheteurs, j'ai toujours le sentiment qu'il faut encore attendre un peu avant de revenir sur les marchés actions dans une optique d'investissement sur le long terme :
Il est tout à fait normal de voir des réactions sur ces seuils techniques critiques, mais il n'est pas certain que l'on puisse espérer un redémarrage du cycle haussier de long terme sur les marchés actions.
J'ai déjà évoqué les raisons pour lesquelles notre équipe pense que les indices boursiers vont au moins sous-performer en 2014, ce qui est le cas. Quant à la transition vers de véritables marchés baissiers, cela pourrait prendre du temps car les investisseurs de long terme n'ont pas encore perdu l'espoir de voir l'indice S&P 500 atteindre 2.000 points cette année.
Les indices vont se stabiliser sur leurs supports, et un rebond conséquent pourrait même avoir lieu dans les séances qui viennent. Mais mes graphiques de long terme me poussent à maintenir un avis pessimiste pour les marchés actions durant le reste de l'année.
Ici, je raisonne en termes de pourcentage, et donc dans une optique d'investissement de long terme. Au niveau du trading, il peut y avoir encore des opportunités d'achat comme celle qui s'est présentée à l'ouverture des marchés européens ce matin. Ne confondez pas les deux approches car l'investisseur raisonne en termes de pourcentage avec une seule direction choisie alors que le trader pense beaucoup plus en termes absolus.
Qu'est ce qui me pousse à croire que la baisse des marchés n'est pas terminée ?
Un mélange de facteurs fondamentaux et techniques suggère une sous-performance des indices boursiers par rapport à d'autres classes d'actifs dans les mois qui viennent.
Raisons fondamentales :
- Dégradation des anticipations en matière d'inflation aux Etats-Unis et partout dans le monde : je ne pense pas qu'il y ait un risque de déflation dans l'économie américaine, mais il est clair que les investisseurs ne s'attendent pas à un retour durable de l'inflation vers les 2 %. Il suffit de regarder le point mort d'inflation à cinq ans, qui est tombé à 1,37 % cette semaine, pour le comprendre. Ceci favorise une appréciation des Bons du Trésor US, et ces actifs pourraient justement continuer de surperformer les marchés actions comme c'est déjà le cas depuis le début de l'année.
- Risque de ralentissement prolongé de l'économie mondiale : année après année, les institutions financières internationales sont amenées à revoir à la baisse leurs prévisions de croissance. Certains croire encore que les liquidités des banques centrales peuvent nous mettre durablement sur les bons rails, mais il est clair qu'il manque les réformes structurelles pour permettre un réel cycle vertueux de croissance comme dans le passé. Depuis la mi-septembre, les marchés commencent (enfin) à se rendre compte qu'il en faudrait plus pour qu'une reprise durable soit possible. Sans cela, on risquera toujours d'être déçu par une croissance économique positive mais péniblement faible.
- Risque de crédit et de deleveraging : nous commençons tout juste à voir une augmentation de la volatilité qui ne dépend pas forcément d'annonces macroéconomiques. Il y a à peine trois mois, les marchés étaient encore dans une situation de complaisance avec une faible participation et un levier qui atteint des niveaux historiques mois après mois. Il y a clairement un risque de voir un événement, ou un thème général comme le ralentissement économique, entraîner un processus de deleveraging sur le marché action US. Ceci favoriserait naturellement une appréciation des Bons du Trésor compte tenu de leur caractère refuge.
Dans l'immédiat, je vois deux événements qui seraient capables de représenter un catalyseur de volatilité sur les marchés :
- Produit intérieur brut (PIB) de la Chine (21 oct.) : on s'attend à un ralentissement de la croissance chinoise au troisième trimestre avec un rythme annualisé de 7,2 % contre 7,5 % le trimestre précédent. Cela représente la croissance la plus lente du PIB chinois depuis le deuxième trimestre de 2009. Comme les investisseurs sont focalisés sur l'état de l'économie mondiale en ce moment, il est tout à fait possible qu'une croissance inférieure aux attentes engendre une forte augmentation de la volatilité sur les marchés la semaine prochaine.
- Tests de résistance des banques européennes (26 oct.) : la Banque centrale européenne dévoilera les résultats des tests de résistance des banques à la fin du mois, et ce genre d'événement peut impacter fortement la perception du risque de crédit sur les marchés financiers. Le sujet est délicat, et l'interprétation des résultats pourrait être compliquée. Mais il est clair qu'une méfiance générale de ses résultats pourrait raviver les inquiétudes vis-à-vis de l'efficacité de la politique monétaire de la BCE. C'est exactement ce que nous avons vu lorsque les indices européens ont commencé à chuter durant la deuxième moitié de septembre.
Raisons techniques :
Si ce n'est pas une bulle, on peut dire au moins que le risque de surchauffe était présent lorsque le S&P 500 évoluait autour des 2.000 points. Historiquement, l'indice a tendance à revenir sur sa moyenne mobile simple à 100 semaines (MVA100) lors des périodes de correction sur les marchés actions. Cette moyenne se situe actuellement à 1.740 points.
En étudiant le Disparity Index sur 100 semaines, qui mesure l'écart entre le cours du marché et cette moyenne mobile, on observe une divergence baissière sur les dix derniers mois. Ce genre de configuration ne me donne pas de confiance quant aux perspectives de hausse sur le moyen terme. Je considère le marché donc dans un processus de retour à la moyenne, qui expose les investisseurs à davantage de baisse.
Maintenant pour un graphique qui valide plusieurs raisons fondamentales pour laquelle les Bons du Trésor pourraient surperformer les marchés actions. Le ratio de l'ETF "20+ Year Treasury Bond" sur le S&P 500 s'est stabilisé sur ses plus bas de 2007 cette année et rebondit nettement depuis quatre semaines. Sans invalidation de cette configuration technique, une hypothèse baissière sur les marchés actions (ou au moins sous-performance par rapport aux obligations) à terme sera toujours plausible.
Enfin, notez également que le ratio S&P 500 / XAUUSD testait également des niveaux historiques au début de la correction des indices boursiers. Ce ratio corrige actuellement sous ses sommets de 2008 avec l'once d'or actuellement en phase de rebond sur ses plus bas de 2013. Ceci ne favorise pas forcément une baisse du S&P 500, mais plutôt une sous-performance par rapport au métal jaune dans les semaines qui viennent.
Par Adrian Raymond, Analyste de Marché pour DailyFX