La Commission européenne a lancé jeudi une enquête antidumping contre les fabricants chinois de panneaux solaires, aussitôt déplorée par Pékin, qui risque d'aggraver le conflit commercial qui oppose des sociétés européennes d'énergie photovoltaïque à leurs rivales chinoises.
"La Commission européenne a lancé aujourd'hui une enquête antidumping concernant les importations de Chine de panneaux solaires et de leurs principaux composants", indique-t-elle dans un bref communiqué.
Cette décision a été prise à la suite d'une plainte cet été d'un groupement d'entreprises européennes présentes dans l'industrie solaire.
"La plainte a apporté suffisamment d'éléments mettant en évidence un possible dumping des prix de la part des exportateurs (chinois) vers le marché européen, des dommages pour l'industrie solaire européenne (...). Par conséquent, la Commission a jugé qu'il y avait suffisamment d'éléments justifiant de prime abord l'ouverture d'une enquête".
Pékin a déploré aussitôt l'ouverture de cette enquête.
"La Commission européenne a décidé de lancer l'enquête antidumping en dépit d'appels répétés de la Chine pour résoudre le différend sur les produits photovoltaïques par la consultation et la coopération. La Chine le regrette vivement", a déclaré le ministère chinois du Commerce dans un communiqué.
La Commission européenne a rappelé que la plainte reçue par Bruxelles est "la plus importante à ce jour en matière de dumping", en prenant en compte la valeur des importations concernées.
La Chine a exporté en 2011 vers l'Union européenne des panneaux solaires et des composants pour environ 21 milliards d'euros.
Les entreprises européennes rassemblées dans le groupement baptisé EU ProSun reprochent à Pékin d'accorder des prêts importants et de prendre des mesures protectrices en faveur de leurs rivales chinoises, leur permettant d'écouler leurs modules à des prix inférieurs aux coûts de production.
Ce groupement a déposé plainte le 25 juillet, arguant que les panneaux solaires et les composants-clés importés de Chine vers le marché européen l'étaient à des prix inférieurs à ceux du marché.
Son objectif est que l'UE prenne des mesures de rétorsion douanières, sur le modèle des Etats-Unis qui ont instauré en mai de fortes taxes sur les importations de produits solaires chinois.
Pékin a longtemps espéré que les fabricants de panneaux solaires européens et chinois parviendraient à résoudre leur différend par des consultations. Les fabricants chinois ont toutefois pris les devants, en formant leur propre coalition, l'Afase (Alliance pour une énergie solaire abordable).
"L'enquête prendra 15 mois au total, même s'il est possible d'imposer des mécanismes de défense commerciale en neuf mois, si les preuves sont suffisantes", ajoute la Commission dans son communiqué. Une décision sera donc prise au plus tard le 5 décembre 2013.
Bruxelles va désormais faire parvenir un questionnaire aux parties concernées (fabricants chinois, fabricants européens et associations du secteur) pour faire un état des lieux et constater d'éventuelles mesures de dumping.
Si ses soupçons sont fondés, la Commission peut imposer des mesures restrictives pour une durée de cinq ans aux fabricants chinois, mais elle doit d'abord s'assurer que celles-ci ne vont pas être trop coûteuses pour l'Union européenne.
D'après un classement établi par l'Agence internationale de l'énergie (AIE), sept des dix principaux fabricants mondiaux de modules photovoltaïques sont chinois. L'Allemagne, pionnière de l'industrie photovoltaïque, est la plus affectée et ses producteurs déposent le bilan les uns après les autres, jusqu'au fleuron du secteur Q-Cells.
Fin août, lors d'une visite en Chine, la chancelière allemande Angela Merkel avait dit espérer "une solution négociée par le dialogue" dans ce conflit commercial.