La France a jugé mardi inacceptable la décision de la Commission européenne de réduire l'an prochain l'allocation au programme d'aide alimentaire destiné aux plus démunis des Européens et l'a sommée de revenir sur cette mesure.
"Au moment où l'Europe est traversée par des crises, personne ne comprendrait que la Commission ne soit pas capable d'alimenter le programme en faveur des plus fragilisés de nos compatriotes", s'est insurgé le ministre pour les Affaires européennes Laurent Wauquiez à son arrivée à Luxembourg pour préparer le sommet des dirigeant de l'UE organisé jeudi à Bruxelles.
"C'est un sujet de préoccupation très important pour la France", a-t-il affirmé.
"Nous attendons de la Commission qu'elle arrête des propositions opérationnelles qui permettent de concilier les décisions de justice (à l'origine de sa décision) et les impératifs politiques", a-t-il annoncé.
"Ce n'est pas la technique qui doit dicter les choix politiques", a-t-il averti à l'adresse de l'exécutif européen dirigé par le conservateur portugais José Manuel Barroso.
La Commission européenne a annoncé une baisse drastique de l'allocation au Programme européen d'aide aux plus démunis, ramenée de 500 à 113 millions d'euros l'an prochain du fait d'une décision de la justice européenne.
"Cette réduction (des fonds) est le fait d'un arrêt rendu par (la justice européenne) en avril dernier dans lequel la juridiction européenne établit que la réglementation actuelle impose que les denrées couvertes par ce régime proviennent des stocks publics de l'UE" et non de fonds issus du budget de la Politique agricole commune (PAC), a expliqué lundi la Commission dans un communiqué.
Un porte-parole de la Commission a affirmé mardi que la décision de réduire les fonds constituait "une frustration importante" pour l'exécutif européen. Mais, a-t-il ajouté, il y a "un blocage" de la part de certains Etats européens pour faire évoluer la situation. Le porte-parole n'a pas cité les Etats responsables du blocage.
La question doit être évoquée lors d'une réunion des ministres européens de l'Africulture dans une semaine à Luxembourg.
Selon plusieurs associations caritatives, la baisse drastique de l'aide aux plus démunis pourrait priver au moins 2 millions d'Européens de l'aide alimentaire dont ils ont besoin.
Selon les estimations, 43 millions de personnes dans l'UE sont menacées par la pauvreté alimentaire.
La distribution gratuite de nourriture en Europe a été lancée pour la première fois, dans l’urgence, lors de l’hiver exceptionnellement froid de 1986. A cette époque, l’Europe disposait de stocks excédentaires de produits agricoles. Ils furent donnés à des associations caritatives se chargeant de leur distribution aux plus démunis. Mais, lors de la réforme de la PAC en 1990, ces stocks européens furent supprimés.
L’Europe remplaça les stocks par une enveloppe financière représentant 1% du budget de la politique agricole de l’Union Européenne, soit 500 millions d’euros attribués aux Etats de l'UE qui les répartissent entre les associations distributrices. Cet apport financier européen représente pour certaines d’entre elles jusqu’à 50% de leurs ressources, voire 90% en Pologne.
Mais, l’Allemagne, soutenue par la Suède, a déposé une plainte devant la Cour Européenne de Justice au motif que les 500 millions d’euros émanant du budget de la PAC constituaient, selon elles, une aide financière purement sociale qui "aurait perdu tout lien avec la politique agricole commune" et qui enfreint les principes de l’OMC (Organisation mondiale du commerce).
La Cour européenne de Justice a donné raison à l'Allemagne dans un arrêt rendu en avril dernier. La Commission n'avait pas fait appel.