PARIS (Reuters) - La réforme du compte pénibilité annoncée samedi soir par le Premier ministre Edouard Philippe va bénéficier à 10.000 personnes dès l'année prochaine, a déclaré dimanche la ministre du Travail Muriel Pénicaud face aux critiques.
"Dès l'année prochaine les examens médicaux vont permettre à 10.000 personnes de partir à la retraite deux ans avant, tout en libérant les PME d'une contrainte administrative", a expliqué Muriel Pénicaud lors du Grand Rendez-vous CNEWS, Europe 1 et Les Echos.
Depuis son entrée en vigueur le 1er janvier 2015, le compte personnel de prévention de la pénibilité n'a pas cessé d'être sous le feu des critiques des organisations patronales, qui le jugent trop contraignant, voire inapplicable.
Dans un courrier adressé aux syndicats Edouard Philippe a indiqué que le gouvernement entendait revenir sur quatre critères de cette mesure : la manutention manuelle de charges, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et les risques chimiques.
Cette réforme vise à accélérer la mise en oeuvre de la mesure tout en la simplifiant pour les entreprises en transférant aux médecins le rôle de mesurer les effets de la pénibilité, selon la ministre du Travail.
RÉACTION CONTRASTÉE DES PARTENAIRES SOCIAUX
Les représentants du patronat ont salué l'annonce du gouvernement.
Dès samedi, le Medef, à la pointe de la résistance patronale au compte pénibilité, a pris acte de la réforme proposée, qui s'inscrira dans le cadre du projet de loi d'habilitation visant à réformer le code du travail par ordonnances.
Le président de la CPME, François Asselin, a souligné sur franceinfo qu'il "fallait remettre les pieds sur terre et trouver un système qui soit pragmatique".
L'U2P s'est félicité "que le pragmatisme l’emporte sur le dogmatisme" précisant qu'il était "impossible pour les entreprises, en particulier les plus petites de mesurer" les facteurs exclus par le gouvernement.
Au contraire, selon Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, le dispositif "n'est pas remis en cause".
"Cela fait trois ans que le patronat nous dit que cette mesure est une usine à gaz, une mesure difficile. Aujourd’hui, alors qu’on maintient six critères et que depuis des semaines, ils font tout pour les supprimer, ils font croire à leurs troupes que le dispositif est remis en cause", a-t-il ironisé sur franceinfo.
De son côté, Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT a déploré sur France 3 un "raté particulièrement important", notamment sur la méthode.
Le syndicaliste a reconnu qu'il fallait revoir des choses sur les critères du compte pénibilité pour, selon lui "appréhender le travail", avec notamment le besoin de prendre en compte le burn-out.
L'annonce d'Edouard Philippe a aussi été critiquée par Benoît Hamon, qui avait fait de la question du mal-être au travail l'un des points centraux de sa campagne pour la présidentielle.
"On n'a pas les ingénieurs capables de créer le logiciel permettant de mesurer le niveau d'exposition par rapport à ces dix critères ? Ce n'est pas vrai", a déploré sur BFMTV le fondateur du Mouvement du 1er juillet, fustigeant une absence de "volonté politique".
(Cyril Camu, édité par Eric Faye)