L'OCDE a appelé mardi les banques centrales et les gouvernements à ne pas casser par trop de rigueur la croissance mondiale, qui s'affermit mais reste menacée, notamment par l'inconnue chinoise.
L'Organisation de coopération et de développement économiques a abaissé mardi sa prévision de croissance mondiale cette année, à 3,4% contre 3,6% attendus en novembre dernier, mais maintenu son pronostic de 3,9% l'an prochain, à l'occasion de la publication mardi de ses "Perspectives économiques mondiales".
L'OCDE estime que la reprise "a gagné en dynamisme" dans les pays développés et que les risques sur l'économie mondiale sont "plus équilibrés", mais prévient que l'accompagnement de la décélération de certains pays émergents, en particulier la Chine, est "un défi majeur".
Pour la Chine, elle a d'ailleurs revu en forte baisse sa prévision de croissance 2014, à 7,4% contre 8,2% prévus en novembre. Pour 2015, elle prévoit un rythme encore un peu inférieur, de 7,3%.
- Le moteur américain -
L'OCDE, organisation de 34 pays industrialisés dont la création remonte à la Guerre froide, souligne le rôle du moteur américain parmi les économies avancées: la reprise aux Etats-Unis devrait "accélérer", tandis que le "redressement de l'activité devrait être moins marqué dans la zone euro". Au Japon, "le renforcement de l'assainissement budgétaire bridera la dynamique de la croissance".
Si dans l'ensemble l'Organisation juge que la priorité n'est désormais plus d'éviter un "désastre" mais de "promouvoir une reprise plus forte et résiliente", elle énumère néanmoins des risques pesant sur l'économie mondiale.
L'OCDE estime que, "pour une part, la décélération (dans les pays émergents) n'est pas alarmante et reflète simplement un ralentissement conjoncturel après une période de surchauffe" et que "les taux de croissance désormais observés en Chine sont incontestablement plus soutenables."
"Cela étant, gérer le ralentissement du crédit et les risques qui se sont accumulés pendant la période d'abondance de liquidité à l'échelle mondiale pourrait constituer un défi majeur", selon elle.
- La Chine, défi majeur -
"En Chine, il n’est pas certain que les autorités réussiront (...) à ralentir l'expansion rapide du crédit (...) et à freiner l'investissement pour rééquilibrer la croissance au profit de la consommation, sans effets perturbateurs", s'inquiète l'OCDE.
Par ailleurs, "le recul de l'inflation dans la zone euro pourrait conduire à la déflation", phénomène nuisible pour l'activité de baisse durable des prix et des salaires.
"De plus, les risques géopolitiques se sont avivés depuis le début de l'année", autour notamment de la crise ukrainienne, selon l'Organisation.
Face à ces risques, l'OCDE en appelle aux banques centrales et aux gouvernements.
La Banque centrale européenne en particulier doit "prendre de nouvelles mesures pour ramener plus fermement l'inflation vers son objectif", soit un peu moins de 2%, et "se tenir prête à prendre d'autres mesures d'expansion non conventionnelles", estime l'OCDE.
De manière générale, l'Organisation juge que "les politiques monétaires doivent rester accommodantes", sauf aux Etats-Unis, où elle invite la Réserve fédérale à mettre fin en 2014 à ses achats d'actifs ainsi qu'à relever ses taux en 2015.
- La BCE sous pression -
Pour l'OCDE, en zone euro "une nouvelle baisse des taux d'intérêt est justifiée compte tenu de la faiblesse de l'inflation". Cette dernière s'est établie à 0,7% en avril, rebondissant légèrement après 0,5% en février, mais restant loin de la cible de la BCE.
Les économistes estiment pourtant que l'institution de Francfort ne devrait prendre aucune décision lors de la réunion jeudi de son conseil des gouverneurs, laissant sur leur faim l'OCDE mais aussi le gouvernement français, qui veut la voir agir pour faire baisser l'euro.
L'OCDE se fend aussi d'une recommandation pour le Japon, où selon elle "les achats d'actifs devraient se poursuivre comme prévu", tandis qu'en Chine "la politique monétaire devra être assouplie en cas de fléchissement prononcé de la croissance".
Elle invite aussi les gouvernements à ne pas exagérer leurs efforts de rigueur budgétaire.
"Ayant accompli des progrès considérables en matière de stabilisation de leurs finances publiques, la plupart des pays de l'OCDE peuvent (...) se permettre de commencer comme prévu à ralentir" en la matière, juge-t-elle.
L'OCDE fait une exception pour le Japon, où "un assainissement budgétaire rigoureux devrait se poursuivre sans interruption" pour tenter de résorber une dette extrêmement importante (230% du Produit intérieur brut).