François Hollande et Mariano Rajoy, entourés d'une vingtaine de ministres, ont rendez-vous lundi à l'Elysée pour un sommet franco-espagnol dominé par la relance de la croissance en Europe et la question, très sensible en Espagne, des interconnexions énergétiques.
Paris et Madrid entendent pousser une nouvelle fois les feux de la croissance alors que la Commission européenne nouvellement formée a dévoilé mercredi son projet phare: un plan visant à mobiliser 315 milliards d'euros pour booster les investissements.
Avides de subsides, Paris et Madrid sont également intéressés par ce plan. L'économie espagnole se remet péniblement du cataclysme provoqué par l'éclatement de sa bulle immobilière avec un chômage en léger recul mais qui frappe toujours près d'un quart de sa population active tandis que la France bataille pour contenir ses déficits publics et un chômage qui ne cesse de croître.
Le président français et le chef du gouvernement espagnol devraient ainsi appeler lors de leur conférence de presse commune, lundi à l'Elysée, à "une mise en œuvre rapide du plan Juncker" et à son "amplification" afin de parvenir à une véritable "politique européenne d'investissements productifs", confie-t-on à Paris.
L'objectif serait de boucler dès le sommet européen de la mi-décembre le tour de table du plan concocté par le nouveau président de la Commission, Jean-Claude Juncker, afin que les premiers investissements puissent être financés dès l'an prochain.
"Nous nous retrouvons à chaque étape avec l'Espagne pour alerter sur le fait que la situation est sérieuse, que la croissance est trop basse, que l'inflation est exceptionnellement faible, que le chômage et les dettes sont trop élevés et qu'il faut donc agir", fait-on valoir de même source.
- Antenne du Centre Pompidou à Malaga -
Second thème au cœur de ce 24e sommet franco-espagnol: les interconnexions des réseaux d'électricité et de gaz français et espagnols. Isolée des réseaux européens, la péninsule ibérique espère financer la construction d'interconnexions transpyrénéennes par le biais du plan Juncker.
Ces projets poursuivent plusieurs objectifs: désenclaver les réseaux espagnols, parer les pics de consommation, concourir à l'indépendance énergétique de l'UE, enjeu plus crucial encore depuis la crise ukrainienne, optimiser le "mix énergétique" entre énergies renouvelables, surabondantes en Espagne, nucléaire et fossiles...
Recevant le nouveau roi d'Espagne, Felipe VI, et la reine Letizia, en juillet à l'Elysée, François Hollande avait loué ces "projets ambitieux", évoquant l'interconnexion électrique dans le golfe de Gascogne, encore à l'étude, et le triplement des capacités d'interconnexion gazière depuis 2010.
La seule ligne à très haute tension qui doit être mise en service début 2015 entre Baixas (Pyrénées-Orientales) et Santa Llogaia (Catalogne) permettra de doubler la capacité d'échanges d’électricité, ainsi portée à 2.800 mégawatts, l'équivalent de la production d'une centrale nucléaire EPR.
Avec un nouveau Commissaire européen à l'énergie et au climat espagnol, Miguel Arias Canete, Paris estime que "le moment est venu de reprendre des initiatives". La France y voit aussi une opportunité pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans la perspective de la Conférence mondiale sur le climat qu'elle accueillera fin 2015.
En attendant, un "séminaire de haut niveau" rassemblant toutes les parties prenantes devrait se réunir au premier semestre 2015 pour élaborer une stratégie commune autour des interconnexions énergétiques.
Lors du sommet de lundi, une déclaration commune devrait être signée à ce propos ainsi que plusieurs autres sur les questions de sécurité intérieure et de justice, grand classique de la relation franco-espagnole, de la protection des droits d'auteur à l'ère numérique ou de la culture. Le Grand Palais accueillera l'an prochain à Paris une exposition Velasquez tandis que le Centre Pompidou ouvrira une antenne à Malaga.