par Anthony Esposito et Natalia A. Ramos Miranda
SANTIAGO (Reuters) - Le candidat de gauche Gabriel Boric a remporté au détriment de son rival d'extrême droite Jose Antonio Kast le second tour de l'élection présidentielle organisé dimanche au Chili, scellant le retour au sommet d'une gauche progressiste qui avait retrouvé de l'élan dans le sillage des vastes manifestations de 2019.
Dans le centre de la capitale Santiago, des partisans ont célébré la victoire de l'élu âgé de 35 ans qui fut le chef de file des manifestations étudiantes de 2011 réclamant une refonte du système éducatif.
En plus de drapeaux à l'effigie de Gabriel Boric, on pouvait apercevoir des drapeaux arc-en-ciel, alors que les groupes LGBT ont soutenu les politiques inclusives du candidat de gauche, de même que la promesse de celui-ci de rompre avec le modèle économique néolibéral.
"Nous l'avons fait !", s'est réjouie Paola Fernandez, 39 ans, en enlaçant sa fille. Elle a déclaré être heureuse en raison des politiques inclusives voulues par Gabriel Boric.
Après le dépouillement de plus de 99% des bulletins, Gabriel Boric était crédité de 55,86% des voix, contre 44,14% pour Jose Antonio Kast, qui a concédé la défaite.
"Je me suis tout juste entretenu avec @gabrielboric et je l'ai félicité pour son immense succès", a déclaré sur Twitter (NYSE:TWTR) le candidat d'extrême droite. "A compter de ce jour il est le président élu du Chili et il mérite tout notre respect et notre collaboration constructive. Le Chili passe toujours d'abord".
Le scrutin intervenait deux ans après le mouvement de contestation parfois violent dénonçant les inégalités sociales. Ces manifestations ont débouché sur la rédaction, toujours en cours, d'une nouvelle Constitution destinée à remplacer celle datant de la dictature d'Augusto Pinochet.
"Je serai le président de tous les Chiliens", a déclaré Gabriel Boric lors d'un entretien avec le président sortant de centre droit, Sebastian Pinera, qui ne pouvait se représenter et quittera le pouvoir en mars.
Depuis le retour à la démocratie dans le pays, en 1990, jamais une élection n'avait donné lieu à autant de divisions. Une partie de l'électorat voulait une réforme du modèle économique, tandis que d'autres électeurs privilégiaient une ligne plus dure contre la criminalité et l'immigration.
Jose Antonio Kast, défenseur d'Augusto Pinochet, a fait campagne sur le thème de la lutte contre la criminalité et le trafic de drogue. Souvent comparé au président brésilien Jair Bolsonaro, il est considéré comme le héros de la droite chilienne "décomplexée".
Gabriel Boric et Jose Antonio Kast marquent tous les deux une rupture avec la tradition centriste qui prévalait dans l'ère démocratique chilienne. Tous deux ont modéré leurs positions, dans l'entre-deux tours, dans l'espoir de convaincre les électeurs centristes.
Le président élu va se retrouver confronté à une période complexe, avec la nécessité de négocier avec l'opposition alors qu'aucun camp ne dispose de la majorité dans un Congrès fragmenté, a estimé Miguel Angel Lopez, enseignant à l'université du Chili.
"Il doit désormais avoir un discours fort pour tenter de mettre fin à l'incertitude. Beaucoup de choses vont dépendre de cela, de ses nominations et de ses décisions. Les investisseurs internationaux vont être très attentifs", a-t-il déclaré.
(Reportage Anthony Esposito et Natalia Ramos; version française Jean Terzian)