Dassault Aviation a tourné mardi une page de son histoire en choisissant Eric Trappier pour succéder au PDG Charles Edelstenne, qui a fait du constructeur du Rafale un pilier de l'industrie de défense française.
Eric Trappier, 52 ans, jusqu'à présent responsable des campagnes de vente d'avions de combat à l'étranger, sera assisté d'un directeur général délégué, poste créé pour Loïk Segalen, le patron des finances du groupe.
Les deux hommes ont été nommés par le conseil d'administration de Dassault Aviation sur proposition de Charles Edelstenne, PDG depuis 2000, qui atteindra la limite d'âge de 75 ans le 9 janvier prochain et cèdera les commandes la veille, a annoncé le constructeur dans un communiqué.
Eric Trappier, ingénieur de formation, est entré chez Dassault Aviation en 1983 et s'est rapidement spécialisé dans les ventes à l'exportation. Il connaît bien les industriels européens, et notamment le britannique BAE Systems, avec lequel Dassault mène une étude sur le futur drone de combat européen.
Cet homme enjoué a conduit la négociation avec les Emirats Arabes Unis pour la vente de 32 avions de combat Mirage 2000-9, signée en 2008, et les tractations avec l'Inde dont l'armée de l'air devrait finaliser dans les prochains mois l'achat de 126 Rafale. Ce serait le premier succès du Rafale à l'exportation après de nombreuses déconvenues.
Plus réservé, voire austère, Loïk Segalen, 52 ans, tient les finances du groupe depuis plus de dix ans. Depuis 2011, il a le titre de directeur général des affaires économiques et sociales.
Réussir le lancement du prochain avion d'affaires
Outre la conclusion du contrat Rafale en Inde, le nouveau PDG devra réussir le lancement au printemps du prochain avion d'affaires, le SMS, sur lequel Dassault conserve le plus grand secret.
Charles Edelstenne n'est pas homme à prendre sa retraite. Il reste administrateur de la société et devrait continuer à siéger au conseil des sages, qui prodigue ses conseils à Serge Dassault, le patron de la holding familiale, et ses enfants.
Il bataillait toujours cette semaine avec l'Etat pour choisir le prochain PDG de l'électronicien de défense Thales, dont Dassault Aviation est devenu l'actionnaire industriel en 2009.
Sous sa direction, le constructeur historique du Mirage n'est pas seulement devenu une référence pour les avions d'affaires de haut de gamme (qui ont représenté les trois quarts de son chiffre d'affaires de 3,3 milliards d'euros en 2011) mais un pilier de l'industrie de la défense française.
En prenant 26% du capital de Thales, aux côtés de l'Etat qui en conserve 27%, Edelstenne a cherché à devenir un acteur incontournable de la défense. Quatre fois plus gros que Dassault Aviation (13 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2011), l'électronicien fabrique aussi blindés, satellites et drones et détient une participation de 35% dans le constructeur naval DCNS.
Eric Trappier devra sans doute défendre cette position. Avant son élection, le président François Hollande avait annoncé dans une allusion claire à Dassault qu'il n'entendait pas abandonner l'avenir des grands groupes industriels de défense "à des intérêts privés ou financiers à qui le gouvernement s'est trop souvent plié".