La Commission européenne a laissé entendre lundi qu'elle pourrait faire preuve de souplesse à l'égard de l'Espagne et de ses objectifs de réduction du déficit en raison de la dégradation de la situation économique du pays.
"L'Espagne s'est engagée avec ses partenaires européens sur des objectifs en matière de consolidation budgétaire" et "ce sont les paramètres que l'Espagne doit respecter", a déclaré le porte-parole de l'exécutif européen pour les questions économiques, Amadeu Altafaj, lors d'une conférence de presse.
"Ceci dit, il y a une analyse économique qui doit être faite par les services de la Commission (...) qui tient compte de l'environnement économique dans lequel les pays évoluent", a souligné le porte-parole, rappelant que cette clause faisait partie du Pacte de stabilité européen, l'instrument de discipline budgétaire de l'UE.
Il a ajouté que la Commission y verrait plus clair après la publication prévue le 11 mai de ses nouvelles prévisions de croissance et de déficit public pour les différents pays européens.
"Il y a de la flexibilité dans le Pacte lorsque la situation (économique) s'est modifiée" dans un pays pour des raisons échappant à la responsabilité du gouvernement, souligne un haut responsable européen, sous couvert de l'anonymat. "Il faut appliquer le Pacte de façon intelligente", dit-il.
Madrid a obtenu déjà un petit répit pour cette année de la part de ses partenaires européens avec un objectif de réduction du déficit public relevé à 5,3% du Produit intérieur brut (PIB) contre 4,4% programmé initialement.
Mais pour l'année prochaine le gouvernement espagnol doit revenir à 3%, limite maximale tolérée en principe par le pacte de stabilité. Or, de nombreux économistes estiment déjà que l'Espagne ne pourra tenir cet objectif compte tenu de la récession qui frappe le pays et qu'il sera donc repoussé au bout du compte.
Le PIB espagnol a reculé de 0,3% au premier trimestre après avoir fait de même au dernier trimestre 2011.
Même si elle se défend de tout changement de cap, la Commission paraît lentement adoucir son discours en matière de discipline budgétaire, alors que la grogne contre l'austérité enfle dans les opinions publiques européennes.
Elle multiplie les signaux en ce sens. Ainsi, samedi, le commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn, a assuré que le pacte de stabilité ne serait pas appliqué de manière "stupide". "La consolidation budgétaire, bien que nécessaire, doit s'appliquer de manière à favoriser la croissance et de façon différenciée", a indiqué M. Rehn.
Le chef du gouvernement italien Mario Monti vient lui de lancer un débat sur la nécessité d'avoir une lecture plus souple des règles.
Il plaide pour la clémence à l'égard des dépenses d'investissement d'avenir des pays. La question n'est pas nouvelle en soi - la France avait mené sans succès une offensive sur ce terrain en 2003 en vue de réformer le pacte de stabilité -, mais elle trouve un écho nouveau depuis que la croissance revient au premier plan des préoccupations, y compris au sein de la Commission.
"Toutes les dettes ne se valent pas, les dettes de fonctionnement ou d'investissement pour l'avenir ne se valent pas", souligne un haut fonctionnaire de la Commission sous couvert de l'anonymat, tout en appelant à ne pas envoyer "un message de laxisme" aux marchés aujourd'hui.
C'est la raison pour laquelle dans l'immédiat Bruxelles insiste pour que la France de François Hollande respecte son objectif de retour du déficit public à 3% l'an prochain. "La France est capable de le faire si elle fait des efforts", dit le haut responsable européen.