par Joan Faus et Jessica Jones
BARCELONE (Reuters) - Les différents partis indépendantistes de Catalogne ont remporté dimanche assez de sièges pour renforcer leur majorité au Parlement régional, même si le score de la branche locale du Parti socialiste au pouvoir en Espagne laisse entrevoir un dialogue, plutôt qu'une rupture, avec le gouvernement à Madrid.
Après dépouillement de 99% des bulletins, les séparatistes étaient donnés victorieux de 50,9% des suffrages, franchissant pour la première fois le seuil des 50%.
Le scénario le plus probable est que les deux principaux partis séparatistes reconduisent leur coalition gouvernementale sortante.
Toutefois personne ne s'attend à une répétition du bras de fer de 2017 entre la région et le pouvoir central de Madrid. Les tensions, qui avaient alors atteint un niveau inédit, ont reflué depuis et les électeurs étaient dimanche davantage préoccupés par l'épidémie de coronavirus.
Il est possible que la faible participation sur fond de crise sanitaire, 53% contre 79% lors du précédent scrutin en 2017, a favorisé les partis séparatistes, dont les partisans se sont mobilisés.
Dans les bureaux de vote, les assesseurs ont revêtu des combinaisons, des masques et des visières pendant la dernière heure du scrutin, surnommé "l'heure zombie", réservées aux électeurs malades du COVID-19 ou soupçonnés de l'être.
Le parti indépendantiste de gauche Esquerra Republicana de Catalunya (ERC) a annoncé qu'il mènerait le gouvernement régional et qu'il tenterait d'obtenir le soutien d'autres partis pour la tenue d'un référendum sur l'indépendance.
"Le pays débute une nouvelle ère avec (les séparatistes) dépassant pour la première fois les 50% de suffrages (...) Nous avons une force immense pour réaliser un référendum et une république de Catalogne", a déclaré le chef de file intérimaire de l'ERC, Pere Aragones, appelant le président du gouvernement espagnol Pedro Sanchez à entamer des discussions sur un référendum.
Mais le Parti socialiste, qui a terminé en tête de ce vote fragmenté, obtenant plus de 23% des voix et autant de sièges que l'ERC - 33, dans une assemblée qui compte 135 sièges -, devrait aussi tenter de former un gouvernement.
Le candidat socialiste Salvador Illa, qui était jusqu'à récemment en charge de la lutte contre le coronavirus en Espagne en qualité de ministre de la Santé, a déclaré qu'il y avait une volonté générale de réconciliation en Catalogne après des années de séparatisme.
Il a dit vouloir obtenir une majorité parlementaire, ce qui nécessiterait toutefois une alliance improbable avec d'autres partis.
Le mouvement de centre droit Junts était crédité de 32 sièges seulement, tandis que le parti séparatiste d'extrême gauche CUP était donné victorieux de neuf sièges. Ces deux partis sont considérés comme primordiaux dans l'objectif d'une nouvelle coalition gouvernementale séparatiste.
Vox (extrême droite) fait quant à lui son entrée au Parlement régional, avec 11 sièges, se classant devant le Parti populaire (PP), principal parti de la droite espagnole, et le mouvement centriste Ciudadanos. Vox est déjà le troisième parti du Parlement national.
Le fait qu'ERC remporte davantage de sièges que Junts pourrait par ailleurs renforcer la stabilité du gouvernement national. ERC avait en effet joint ses voix à celles des socialistes à plusieurs reprises à Madrid en échange de discussions sur le conflit politique en Catalogne.
(avec Luis Felipe Castilleja, Jordi Rubio, Nacho Doce et Albert Gea; version française Camille Raynaud et Jean-Stéphane Brosse, édité par Marc Angrand et Jean Terzian)