PARIS (Reuters) - François Hollande et le gouvernement ont rejeté mercredi les accusations de "bricolage" industriel et électoraliste qui ont fusé après l'annonce d'un plan de sauvetage du site Alstom (PA:ALSO) de Belfort.
L'Etat a pris ses responsabilités en conciliant maîtrise des finances publiques et pérennité de l'entreprise, a ainsi déclaré le chef de l'Etat lors de l'inauguration du centre de recherche de Safran (PA:SAF) Electronics et Défense à Eragny (Val-d'Oise).
De son côté, le secrétaire d'Etat à l'Industrie, Christophe Sirugue, qui a conduit les négociations avec Alstom et les autres acteurs de la filières ferroviaire, a justifié la mesure la plus contestée, l'achat par l'Etat de 15 rames TGV.
"Le choix qui a été fait, c'est d'assurer par la commande d'Etat de donner toutes sortes de charges à des sites et à des entreprises qui en ont le plus besoin", a dit François Hollande. "Quand l'Etat est absent, on met en cause son inertie. Mais quand l'Etat est présent, on s'interroge sur les moyens dont il dispose pour assurer l'avenir", a-t-il ajouté.
Le plan comprend l'accélération de commandes déjà en discussion et un début de diversification du site de Belfort, où 70 millions d'euros seront investis, pour en faire notamment un centre européen de maintenance des locomotives.
La mesure la plus moquée par l'opposition est la commande anticipée par l'Etat, pour environ 500 millions d'euros, de 15 TGV voués à rouler sur des voies traditionnelles qui ne seront au mieux transformées en lignes à grande vitesse qu'en 2025-2030, avec les coûts supplémentaires de fonctionnement que cela suppose.
RATIONALITÉ ÉCONOMIQUE
Christophe Sirugue a défendu la rationalité économique de cette décision devant la commission des Affaires économiques de l'Assemblée Nationale.
Il a rappelé que la liaison Bordeaux-Marseille, à laquelle sont destinées ces 15 rames de TGV Euroduplex, était une des trois lignes "structurantes" identifiées par un récent rapport parlementaire et que leur matériel roulant vieillissant devait de toute façon être remplacé à plus ou moins brève échéance.
L'Etat, en tant qu'autorité organisatrice des transports sur les liaisons Intercités, avait deux possibilités, a expliqué le secrétaire d'Etat à l'Industrie.
L'une consistait à acheter d'abord des trains Intercités pour 350 millions d'euros, puis, lors de la mise en service des futures LGV, des rames TGV pour 450 millions d'euros.
L'autre, retenue par le gouvernement, consiste à acheter dès maintenant des TGV, quitte à les faire rouler à la vitesse des trains Intercités en attendant l'arrivée des tronçons LGV.
"Ce n'est donc pas une commande supplémentaire", a fait valoir Christophe Sirugue. "Le gouvernement a fait le choix de ne pas acheter du matériel deux fois. Ainsi il prend, me semble-t-il, la meilleure décision à long terme pour le contribuable."
Faire rouler des TGV sur des lignes traditionnelles n'est pas nouveau, a-t-il souligné. Il a notamment cité le cas des liaisons Marseille-Nice, Le Mans-Quimper et Tours-Bordeaux.
Enfin, le choix de rames TGV Euroduplex "permet des gains substantiels" sur les frais de maintenance et de développement en mutualisant ceux-ci avec le parc existant, a-t-il ajouté. "Cela compense le surcoût de fonctionnement."
Christophe Sirugue a également écarté l'idée que cette commande directe de l'Etat, sans appel d'offres, puisse être contestée au niveau européen par des concurrents d'Alstom.
"L'Etat s'appuie (...) sur un contrat-cadre existant entre la SNCF et Alstom pour la fourniture de TGV, qui a en son temps donné lieu à un appel d'offre", a-t-il expliqué.
Cette décision et les autres mesures annoncées donnent, selon lui, de la "visibilité" à six sites d'Alstom et pérennisent 1.500 emplois directs et 3.000 emplois indirects.
(Jean-Baptiste Vey, Elizabeth Pineau et Emmanuel Jarry, avec Yann Le Guernigou)