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Téléphonie: bataille de cartes prépayées à Barbès et La Chapelle

Publié le 29/08/2015 19:07
Un homme près d'une boutique Lycamobile à Paris le 29 août 2015 (Photo THOMAS SAMSON. AFP)
BOUY
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Un homme près d'une boutique Lycamobile à Paris le 29 août 2015 (Photo THOMAS SAMSON. AFP)

Bataille de prix, guerre de territoire: pour exister dans les quartiers populaires, les opérateurs de téléphonie mobile dits "ethniques", qui vendent des cartes prépayées vers l'étranger, offrent des contrats précaires à tour de bras. Parmi eux, l'ex-employeur d'Ayoub El Khazzani, le tireur du Thalys.

Le jeune Marocain mis en examen mardi pour tentatives d'assassinats a obtenu en 2014 un CDD de trois mois chez l'opérateur Lycamobile, interrompu faute de papiers: il distribuait des prospectus et collait des posters dans des boutiques parisiennes.

Ils sont des centaines, comme lui, à travailler sur des contrats de courte durée, pour faire de la pub ou vendre directement, dans des quartiers ciblés, des recharges à une clientèle immigrée, peu habituée aux abonnements et qui téléphone essentiellement vers l'étranger. Quelques centimes d'euros la minute pour le Maghreb ou l'Afrique subsaharienne, à coups de promos permanentes.

Lycamobile et son concurrent Lebara, deux Britanniques qui réalisent des millions d'euros de chiffre d'affaires, sont les leaders de ce marché de niche, dit "ethnique", depuis leur arrivée en France au début des années 2010.

Tout deux louent leur réseau à Bouygues (PARIS:BOUY). "Ça n'embête pas trop le gros opérateur et ça permet de cibler une population précise", développe Sylvain Chevallier, spécialiste des télécoms chez BearingPoint.

Sur ce marché encore jeune, il faut être "très offensif" et "aller chercher les clients, une population extrêmement mouvante et dynamique", ajoute-t-il. D'où ce maillage, qui permet d'acheter une recharge partout.

A Barbès et La Chapelle à Paris, quasiment aucune boutique -coiffeurs, épiciers et bien sûr magasins de téléphonie- n'échappe au retapissage de sa devanture: marine pour Lycamobile, turquoise pour Lebara.

"J'avais un truc dégueulasse", raconte un taxiphone, tout fier de son enseigne lumineuse Lebara. "Eux, ils font leur pub et moi, c'est classe ! Regardez en face !", insiste-t-il, désignant un concurrent.

Il jure n'avoir rien gagné, mais que l'installation a coûté "3.000 euros" à Lebara, dont trois employés sont venus d'eux-mêmes remplacer une LED défaillante.

- 1.200 euros nets -

Convaincre les revendeurs de s'afficher en Lebara ou Lycamobile --mais sans condition d'exclusivité-- c'est la tâche des commerciaux, qui promettent des cartes SIM gratuites ou des commissions accrues sur les ventes.

"Sur 20 euros de crédit, on touche 3 euros", révèle un détaillant. "Sur l'année, ça paye un loyer."

Un autre, dont la boutique constellée d'affiches, d'autocollants et de prospectus Lycamobile fait face au métro, assure toucher jusqu'à "2.000 euros tous les deux ou trois mois".

"On est dans un monde de margoulins, une sorte de marché gris", analyse sous couvert d'anonymat un spécialiste du secteur. "On promet monts et merveilles aux commerçants et parfois, ça ne se réalise pas..."

Ce flou touche aussi les employés. En 2012, des salariés lyonnais de Lycamobile se sont mis en grève, soutenus par la CGT, avant d'aller aux prud'hommes, pour "des problèmes de rémunération" ou contester leur licenciement.

"La boîte n’appliquait pas les conventions collectives", raconte à l'AFP Patrick Soulinhac, le syndicaliste qui les a défendus, qui précise que les procédures sont toujours en cours.

"C'est une société qui employait des gens en grande précarité, qu'ils payaient au Smic alors qu'ils auraient dû être payés plus", détaille-t-il. "On leur faisait faire de la vente à la sauvette et ils se retrouvaient en difficulté face aux flics."

Sans contact depuis avec les employés qu'il a représentés, des Sri-Lankais, il imagine que "la situation a dû s'améliorer".

Ce n'est pas vraiment l'avis d'une salariée s'exprimant sous couvert d'anonymat, trois CDD chez Lycamobile, maintenant chez le concurrent.

"On te dit qu'on te donne des bonus et on te paye jamais. Je les ai menacés de faire venir la police, ils ont fini par me payer", peste-t-elle derrière son stand sauvage de recharges Lebara, à La Chapelle. Titulaire d'un master, elle touchait 1.200 euros nets par mois, bonus compris. Sans perspective d'évolution.

Elle ne savait pas qu'Ayoub El Khazzani était passé par chez Lycamobile, mais pour elle, aucun doute, un Marocain non-francophone comme lui, sans qualifications, résident en Espagne, n'a pu être recruté que "par recommandation". "C'est comme ça que ça marche !"

Sur leurs filières de recrutement, les deux entreprises restent muettes. Unique commentaire de Lebara à l'AFP: le groupe "respecte toutes les exigences légales".

Certains viennent du Maghreb, d'Afrique ou de l'est de l'Europe, mais une grande partie sont Sri-lankais, y compris les managers, et beaucoup ne parlent pas français.

Avec les revendeurs, qui ne savent rien d'eux, deux modes de communications: un mot d'anglais, quelques gestes.

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