Deutsche Bank (DE:DBKGn) a écopé d'une amende de près de 630 millions de dollars lundi dans le cadre d'une enquête des autorités américaine et britannique pour blanchiment d'argent en provenance de Russie.
Cet accord, annoncé par le régulateur des services financiers de New York (DFS), clôt une enquête lancée à l'été 2015 après une tentative de corruption d'un trader de la banque allemande à Moscou par des clients russes qui essayaient de dissimuler l'origine de leurs fonds.
Les clients en question voulaient que le trader effectue des opérations de courtage avec un de leurs comptes qui avait été suspendu par Deutsche Bank dans le cadre d'une enquête interne concernant son unité de courtage moscovite.
La banque allemande n'en a pas pour autant fini avec cette affaire car le ministère américain de la justice et la banque centrale (Fed) poursuivent leur propre enquête, a indiqué lundi à l'AFP une source proche du dossier sous couvert d'anonymat.
Contacté par l'AFP, le ministère n'a pas donné suite.
Dans le détail, l'accord annoncé lundi prévoit le versement de 425 millions de dollars au DFS et d'une somme d'environ 204,46 millions de dollars (163 millions de livre britannique) auprès du régulateur britannique FCA.
Les deux régulateurs, dont les enquêteurs ont travaillé ensemble, s'intéressaient tout particulièrement à l'activité de "trading miroir" (mirror trades), avaient indiqué à l'AFP en juillet 2015 des sources proches du dossier.
Le DFS affirme lundi que des clients russes ont utilisé ce mécanisme de courtage spécifique pour sortir illégalement 10 milliards de dollars de Russie grâce à Deutsche Bank.
- Montagnes de litiges -
Concrètement, ces clients ont investi en roubles dans des actifs auprès de la banque à Moscou. Au même moment, le bureau de Deutsche Bank à Londres réalisait des investissements identiques en monnaies internationales pour le compte des mêmes clients représentés par des entités enregistrées dans des paradis fiscaux. Cette pratique a ainsi permis une évasion "légale" des capitaux de Russie.
"Deutsche Bank et plusieurs de ses hauts dirigeants ont manqué des occasions importantes pour détecter, intercepter et enquêter sur un artifice (...) facilité par sa filiale moscovite et impliquant les bureaux de New York et Londres", déplore le régulateur américain, qui s'appuie sur la loi sur le secret bancaire aux Etats-Unis (BSA).
Cette législation et l'organisme du Trésor américain chargé de lutter contre la délinquance financière (FinCEN) exigent des institutions recourant au système financier américain de signaler toute transaction jugée suspicieuse et au besoin de la bloquer.
"Dans le monde actuel de la finance aux réseaux interconnectés, les institutions financières globales doivent être vigilantes dans la guerre contre le blanchiment d'argent et d'autres activités qui peuvent contribuer aux cybercrimes et au terrorisme international", a rappelé Maria Vullo, la patronne du DFS.
L'enquête du régulateur entrait dans le cadre d'une vaste investigation sur le blanchiment de plusieurs milliards de dollars en provenance de Russie, en passant par Londres et utilisant des produits financiers complexes.
Outre les pénalités financières, Deutsche Bank a accepté également de recruter un superviseur indépendant chargé de s'assurer que les nouvelles procédures de contrôle internes sont conformes aux exigences des régulateurs.
Le géant bancaire européen a déjà pris les devants: fin 2015, il avait réduit les risques liés à la Russie en mettant fin à ses activités de banque d'affaires dans le pays. Il y a néanmoins conservé des activités de conseil liées au courtage, celui des devises en l'occurrence.
L'accord de lundi est le dernier signe en date que Deutsche Bank est décidé à en finir avec la montagne de litiges dans lesquels l'établissement est impliqué pour se focaliser sur sa relance après avoir touché le fonds en Bourse.
Le ministère américain de la Justice a par exemple confirmé récemment un accord de 7,2 milliards de dollars avec la banque pour son rôle dans la crise des "subprime", après un précédent compromis sur sa manipulation supposée du taux interbancaire Libor.