PARIS (Reuters) - La préfecture de police de Paris a interdit jeudi par arrêté la vente d'alcool et les activités de livraison et de vente à emporter des bars et restaurants de la capitale de 22h00 à 06h00 du matin, dans le cadre d'un durcissement des restrictions visant à lutter contre la propagation du coronavirus.
En pratique, cet arrêté qui entrera en vigueur vendredi impose donc la fermeture totale des bars et restaurants, ainsi que des péniches pratiquant la vente à emporter, précise la préfecture dans un communiqué https://twitter.com/prefpolice publié sur son compte Twitter (NYSE:TWTR).
Cette mesure, prise en concertation avec la maire Anne Hidalgo, qui en avait annoncé les grands lignes jeudi matin sur les antennes de RMC et BFM TV, vise à éviter "des déplacements ou regroupements de personnes (livreurs, clients...) dans et aux abords de ces établissements alors que la situation sanitaire exige de limiter les interactions sociales" au strict nécessaire, explique la préfecture.
"La vente à emporter de boissons alcooliques, notamment par des épiceries de nuit, est susceptible de favoriser des regroupements nocturnes, sans respect des gestes barrières, sur la voie publique voire dans la sphère privée", ajoute-t-elle.
Anne Hidalgo a estimé qu'il ne s'agissait pas à proprement parler d'un "couvre-feu" "parce que ça ne concerne pas toutes les activités de la ville".
La question d'un possible rétablissement du couvre-feu à Paris et en Ile-de-France, en plus du reconfinement en vigueur depuis vendredi dernier, se pose depuis que le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, l'a annoncé mardi matin avant d'être recadré par Matignon.
S'ils soulignaient alors que rien n'était décidé à ce stade, les services de Jean Castex ajoutaient néanmoins que le retour du couvre-feu était bel et bien envisagé.
"Une journée d’agitation pour rien. La coordination avec la Mairie de Paris a duré 48 heures mais au final on adopte la mesure qui était envisagée dès mardi. C’est bien un couvre-feu pour éviter les attroupements nocturnes", a déclaré une source gouvernementale.
SITUATION CRITIQUE DANS LES HOPITAUX D'ILE-DE-FRANCE
Lors de sa conférence de presse hebdomadaire pour faire le point sur l'épidémie, le ministre de la Santé Olivier Véran n'a annoncé aucun autre durcissement des mesures de restriction, appelant les Français à la responsabilité.
"La durée des règles et la durée des restrictions dépendent en très grande partie de nous et de notre capacité à être solidaires et à tenir bons. Plus nous serons rigoureux, moins le confinement sera long", a-t-il ajouté, répétant que les jours et les semaines à venir seraient "difficiles".
Si le confinement est bien respecté, a-t-il ajouté, "un pic de 6.000 patients en réanimation devrait être atteint à la mi-novembre. Sans confinement, la France aurait connu à la même date quelque 9.000 patients Covid en réanimation, "une situation catastrophique pour nos hôpitaux et pour les malades".
Selon le directeur général de la santé Jérôme Salomon, 58.046 personnes ont reçu mercredi un test positif en France, soit un record quotidien de contaminations. Le bilan s'établit désormais à 39.037 morts, soit 363 de plus que le bilan fourni mercredi, a-t-il dit lors de la même conférence de presse.
Dans les hôpitaux d'Ile-de-France, la situation commence à devenir critique. Le taux d’occupation des lits de réanimation y est actuellement de 92%, selon l'Agence régionale de santé. Ces lits sont occupés pour les deux tiers par des patients positifs au coronavirus.
A l'hôpital Tenon de l'AP-HP, à Paris, les déprogrammations de chirurgies et de soins lourds ont commencé, a déclaré à Reuters le professeur Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses de l'hôpital.
Pour l'instant, il ne reste que huit lits disponibles pour accueillir des patients contaminés par le coronavirus. Comme dans d'autres hôpitaux, des aménagements sont en cours pour augmenter les capacités d'accueil, mais dépendront des ressources humaines disponibles, dit le professeur.
"Une dimension particulière de cette deuxième vague, c’est le personnel (...) qui est épuisé de la première vague", dit Gilles Pialoux qui précise avoir "du mal à trouver du personnel" entre les soignants eux-mêmes malades ou en repos du printemps dernier, les cas contacts et le manque de suppléance.
Pour le professeur, le confinement est venu trop tardivement et devra en conséquence se prolonger au moins jusqu'aux vacances de fin d'année.
"Peut-être que cette année, le Père Noël, ce sera Skype", dit-il. "Ce n'est pas la pire des punitions. La pire des punitions, c’est de rester avec cette dynamique de l’épidémie, de rester avec un service de santé qui a du mal à répondre aux besoins des Français, de tous les Français."
(Henri-Pierre André et Jean-Stéphane Brosse, avec Elizabeth Pineau et Caroline Pailliez, édité par Jean-Michel Bélot)