par Martin Quin Pollard
PEKIN (Reuters) - En Chine, le personnel hospitalier se démène pour surmonter l'arrivée en masse de malades après l'assouplissement soudain des restrictions sanitaires contre le COVID-19.
En plus de 30 ans de carrière en médecine d'urgence, le Dr Howard Bernstein, basé à Pékin, affirme n'avoir jamais connu une telle situation.
"L'hôpital est tout simplement débordé de toutes parts", affirme-t-il, à la fin d'une garde "stressante" à l'hôpital privé Beijing United Family, dans l'est de la capitale.
Des malades, chaque jour plus nombreux, affluent dans son hôpital, la plupart âgés et présentant des symptômes du COVID-19 et de pneumonie.
"L'unité de soins intensifs est pleine", tout comme celui des urgences et bien d'autres, souligne le médecin.
Les patients "ne vont pas mieux en un jour ou deux donc il n'y a pas de circulation. Des gens continuent d'affluer aux urgences où ils sont coincés des jours car ils ne peuvent pas monter dans les chambres", explique-t-il.
La Chine est actuellement touchée par l'une des plus importantes vagues de contamination depuis le début de la pandémie il y a trois ans, mettant sous pression les hôpitaux publics, privés et les crématoriums de Pékin.
"Le plus grand défi, honnêtement, c'est que je pense que nous n'étions tout simplement pas préparés à cela", estime Howard Bernstein.
Après trois années de règles draconiennes contre la propagation de la maladie, Pékin a mis un terme début décembre à sa politique "zéro COVID-19" après plusieurs semaines de vastes mouvements de protestation contre les restrictions à travers le pays.
Mais les experts de santé s'inquiètent d'une saturation d'un système de santé déjà fragile avec l'afflux de personnes contaminées par le coronavirus SARS-CoV-2.
DES MALADES PEU VACCINÉS
Le nombre de patients est cinq à six fois supérieur à la normale et l'âge moyen des malades a considérablement augmenté pour dépasser les 70 ans en l'espace d'une semaine, déclare Sonia Jutard-Bourreau, médecin à l'hôpital Raffles à Pékin.
"La plupart des patients n'ont pas été vaccinés", indique la praticienne d'origine française, en soulignant que beaucoup d'entre eux souhaitent acheter du Paxlovid, l'antiviral de Pfizer (NYSE:PFE), qui commence à manquer.
"Ils veulent ce médicament comme un remplacement du vaccin, mais ce n'est pas un substitut", dit-elle.
Le taux de contamination par le coronavirus est aussi particulièrement élevé chez les soignants, parfois appelés à travailler même en cas de test positif selon des témoignages de plusieurs infirmiers.
Jiang, une infirmière en psychiatrie d'un hôpital de la province de Hubei, a confié que plus de 50% du personnel était absent dans son service, qui a cessé d'accepter de nouveaux patients.
D'après Airfinity, une société d'analyse de données sanitaires basée en Grande-Bretagne, plus de 5.000 personnes meurent probablement chaque jour du COVID-19 en Chine.
Les autorités sanitaires chinoises n'ont signalé aucun décès dû au COVID-19 en Chine continentale entre lundi et samedi.
Après un changement de méthodologie pour comptabiliser les morts du COVID, seuls les patients décédés d'une insuffisance respiratoire ou d'une pneumonie sont comptabilisés par Pékin.
"Ce n'est pas de la médecine, c'est de la politique", estime Sonia Jutard-Bourreau.
La Commission nationale de la santé a indiqué dimanche, sans donner d'explication, que dorénavant elle ne publierait plus les chiffres quotidiens des cas et décès comme ce fut le cas depuis le début de la pandémie.
(Avec le bureau de Pékin, version française Laetitia Volga, édité par Blandine Hénault)