Les principaux instituts de recherche économique en Allemagne ont dressé un tableau morne de l'économie allemande jeudi, la crise de la zone euro finissant par avoir un impact sur la première économie d'Europe, qui jusque-là faisait des envieux par sa résistance.
Dans leur rapport d'automne, ces instituts --l'Ifo à Munich, l'IfW à Kiel, l'IW à Halle et le RWI à Essen-- avertissent que "la croissance économique va rester faible pour le moment et semble bien n'être en mesure que de se redresser légèrement dans le courant de l'année prochaine".
Ils ont divisé par deux leur prévision de croissance pour 2013, à 1%, contre 2% auparavant, et celle de 2012, à 0,8%, contre 0,9% anticipé au printemps.
Avec ces chiffres, "nous sommes vraiment loin devant au niveau européen", a réagi la chancelière Angela Merkel lors d'un point presse à Berlin. "Mais nous sentons aussi que l'effondrement des économies dans plusieurs pays de la zone euro nous touche naturellement... l'Allemagne n'est pas déconnectée", a-t-elle aussitôt ajouté.
"Nous pouvions jusqu'à présent bien résister grâce à une consommation intérieure renforcée ces dernières années. Chez nous, les salaires ont de nouveau augmenté pour la première fois depuis de nombreuses années, les retraites ont augmenté. C'est bien, mais l'Allemagne ne peut être un bon moteur que dans la mesure où les autres suivent", a-t-elle déclaré.
Le Fonds monétaire international (FMI) vient aussi de modifier ses prévisions de croissance pour l'Allemagne, et table sur une hausse de 0,9% du PIB à la fois en 2012 et en 2013.
"Les risques économiques sont considérables", a reconnu le ministre allemand de l'Economie, Philipp Rösler, approuvant l'appel des instituts à poursuivre la discipline budgétaire.
Dans ce contexte, les perspectives du marché du travail ne sont pas très bonnes. Les quatre instituts, qui représentent divers courants de pensée économique, tablent sur une hausse légère du nombre de chômeurs à 2,9 millions de personnes en 2013, avec un taux de chômage restant toutefois stable à 6,8% en 2012 et 2013.
En revanche, le budget de l'Etat restera "presque à l'équilibre en 2013".
Ces nouvelles prévisions pour l'année prochaine partent du principe que la situation en zone euro s'améliorera progressivement. "Si la situation devait continuer à se détériorer, cela aurait un impact sur l'économie allemande", avertissent-ils.
Les instituts ont profité de leur rapport semestriel pour critiquer le nouveau programme de rachat de dettes d'Etat de la Banque centrale européenne (BCE), annoncé en septembre mais pas encore utilisé.
"Cela va augmenter les risques d'inflation", assurent-ils, penchant donc du côté de la Banque centrale allemande, la Bundesbank, qui a clairement affiché son désaccord avec ce programme visant à réduire la spéculation contre certains pays de la zone euro.
Ils regrettent qu'il n'y ait "pas de signes d'une solution de politique économique de long terme et, qu'au contraire, les risques pesant sur la stabilité de la zone demeurent élevés".
Sur la Grèce, les responsables des quatre instituts ont jugé nécessaire une nouvelle restructuration de la dette du pays, lors d'une conférence de presse.
"Je crois que la Grèce ne pourra pas rembourser sa dette", a déclaré Oliver Haltemöller, de l'institut IW. "Nous pensons qu'une aide supplémentaire est nécessaire", a-t-il ajouté, réclamant une implication des créanciers.
Son confrère de l'IFW Joachim Scheide a aussi jugé qu'Athènes devrait une nouvelle fois restructurer sa dette ou se déclarer insolvable.
Dans leur rapport, les économistes regrettent que les pays de la zone euro excluent catégoriquement l'éventualité que l'un d'entre eux se déclare en faillite.
"Pourtant l'insolvabilité serait un moyen approprié pour faire partager aux créanciers les coûts de la crise", écrivent-ils, rappelant avoir demandé à plusieurs reprises la mise en place d'un cadre pour une procédure de faillite des Etats.