Total est de retour en Irak, où plusieurs champs pétrolifères ont été attribués vendredi et samedi, mais le groupe français rentre par la petite porte dans ce pays qui l'a pourtant vu naître et qui ambitionne de venir concurrencer les principaux producteurs de brut.
Total figure à hauteur de 25% dans le consortium, emmené par le chinois CNPC (50%), qui a remporté vendredi le champ d'Halfaya (sud), dont les réserves sont de 4,09 milliards de barils.
Ce cartel, qui compte aussi dans ses rangs le malaisien Petronas (25%), a proposé d'être rémunéré 1,40 dollar par baril et de porter la production à 535.000 barils par jour d'ici à six ans, contre 3.100 b/j actuellement.
Mais il s'agit d'un retour très timide, voire d'une déception.
Halfaya n'était pas le principal des sept champs attribués en deux jours. Et Total, qui espérait décrocher celui de Majnoun, dont les réserves sont évaluées à 12,58 milliards de barils, a été battu par un consortium composé de l'anglo-néerlandais Shell et du malaisien Petronas, qui proposait 1,39 dollar le baril pour une production de 1,8 million de barils par jour.
Cet immense champ pétrolifère du sud de l'Irak, près de la frontière avec l'Iran, ne produit actuellement que 45.900 b/j. Le pétrolier français, là aussi avec CNPC, proposait de porter la production à 1,45 mbj pour une rémunération de 1,75 dollar le baril.
Total "se réjouit de reprendre ses opérations en Irak", a déclaré à l'AFP une porte-parole du groupe, assurant que le pétrolier français avait "participé activement" aux enchères ouvertes par les autorités irakiennes.
Au-delà de ces appels d'offres, "l'Irak a un tel potentiel qu'il y a encore beaucoup d'opportunités pour Total", a-t-elle expliqué.
C'est une découverte d'"or noir" en 1927 à Kirkouk, dans le Nord de l'Irak, qui marque la naissance de Total, alors dénommé Compagnie française des pétroles (CFP).
La CFP opère à l'époque au travers de l'Iraq Petroleum Company, une société à capitaux occidentaux codétenue aux côtés de BP, Shell ou ExxonMobil.
L'Iraq Petroleum Company exerce un véritable monopole d'exploration sur le territoire irakien jusqu'en 1961, quand le gouvernement révolutionnaire du général Kasem y met fin. Puis en 1972, l'Iraq Petroleum Company est nationalisée et les compagnies pétrolières occidentales quittent le pays.
Total est revenu en Irak dans les années 90 pour réaliser des études d'évaluation sur les champs de Majnoun et de Nah Bin Oumar, dans le sud. Le groupe français n'avait toutefois pas pu mener à bien leur mise en production.
Les appels d'offres des derniers jours portaient sur des champs peu développés, ayant besoin d'investissements importants pour leur exploitation.
Fin juin, l'Irak avait fait le premier appel d'offres depuis la nationalisation du pétrole irakien, pour six champs pétrolifères et deux champs gaziers. Le groupe français n'avait alors rien obtenu.
Dans six ans, l'Irak, qui possède les troisièmes réserves au monde avec 115 milliards de barils, espère porter sa production à 12 mbj, contre 2 mbj actuellement, "ce qui en fera le premier producteur au monde", a déclaré le ministre irakien du Pétrole Hussein Chahristani.
"Nous voulons voir Total travailler sur nos champs pétrolifères", avait assuré le président irakien Jalal Talabani mi-novembre, en visite à Paris.
En 2003, juste avant l'offensive américaine pour renverser Saddam Hussein, M. Talabani, alors dirigeant de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), avait vivement critiqué la France pour son refus d'entrer en guerre.
Evoquant "ceux qui mettent leurs oeufs dans le panier du dictateur", il avait laissé entendre que les sociétés françaises, notamment pétrolières, seraient pénalisées après le conflit.