LONDRES (Reuters) - Les mesures annoncées pour répondre au mouvement social des "Gilets jaunes" ne menacent pas les notes souveraines de la France même si elles impliquent une dégradation des finances publiques et peuvent remettre en cause les objectifs budgétaires affichés par Paris, ont estimé mercredi deux des principales agences internationales de notation.
La crainte de voir les mesures annoncées ces derniers jours creuser le déficit français et remettre en cause l'assainissement des finances publiques a provoqué une hausse des coûts d'emprunt du Trésor mais, du point de vue des notes de la France au moins, il n'y a aucune menace dans l'immédiat, estime ainsi Standard & Poor's Global.
Pour S&P, qui attribue à l'Etat français une note "AA" assortie d'une perspective stable, il faudrait une dégradation sensible des finances publiques françaises pour qu'un déclassement de la note souveraine soit envisageable.
"La note de la France est au milieu de la fourchette de notation (AA stable); il faudrait donc sans doute une belle dégradation pour qu'elle évolue en territoire négatif", a expliqué à Reuters Roberto Sifon-Arevalo, analyste sur les dettes souveraines de S&P.
Le ratio de la dette de la France, qui approche les 100% du PIB, est plus élevé que celui de bien d'autres pays mais S&P pense que le gouvernement "amortira" ce supplément de dépense en faisant des coupes ou en augmentant les revenus ailleurs.
Concernant le risque relatif à la réforme des retraites et de la santé, Sifon-Arevalo ajoute : "Nous analyserions le degré d'édulcoration et ce qui serait fait, éventuellement, pour le compenser sans quoi on réagirait prématurément et ça, nous voulons l'éviter".
LES RÉFORMES RESTENT AU PROGRAMME, NOTE FITCH
De son côté, Fitch Ratings estime que "la réponse du gouvernement français aux récents troubles sociaux implique des difficultés persistantes pour la réduction de la dette publique mais ne constitue pas encore un demi-tour brutal en matière de réformes économiques au sens large".
Les mesures de soutien au pouvoir d'achat annoncées par le président Emmanuel Macron "n'annulent pas les réformes emblématiques antérieures du marché du travail et des transports ferroviaires", juge Fitch.
"Le président a aussi refusé de rétablir l'impôt sur la fortune, que le gouvernement considérait comme un obstacle à l'investissement et à la création d'emploi. Nous pensons donc qu'il est trop tôt pour conclure que le gouvernement abandonnera son programme de réformes économiques", poursuit l'agence.
Elle estime néanmoins que "les futures réformes prévues pourrait être plus difficiles à faire voter si le président doit adopter une approche plus consensuelle".
Pour Fitch, donc, l'objectif gouvernemental de réduire de trois points le ratio dépenses publiques/produit intérieur brut (PIB) "semble encore plus difficile à atteindre".
(Marc Jones, Wilfrid Exbrayat et Marc Angrand pour le service français)