PARIS (Reuters) - Les forces de l'ordre ont musclé les dispositifs de surveillance pour éviter les débordements en marge de la manifestation des "Gilets jaunes" samedi à Paris, après les dégradations commises sur les Champs-Elysées la semaine dernière.
Quelque figures du mouvement né de la colère contre la hausse du prix du carburant dont les revendications se sont élargies au pouvoir d'achat ont appelé à manifester le 1er décembre sur les Champs-Elysées pour faire reculer l'exécutif après des annonces jugées insatisfaisantes.
Le ministère de l'Intérieur a prévu de fermer l'avenue à la circulation et d'autoriser l'accès aux piétons après un contrôle d'identité et une fouille des sacs, dans le but d'éviter la répétition des violences de samedi dernier.
Les débordements ont causé plus d'un million d'euros de dégâts sur la chaussée ou l'éclairage public, selon la Ville de Paris qui appelle à manifester calmement. Certaines vitrines de commerce avaient été fracassées et des terrasses vandalisées. La journée s'était soldée par 150 interpellations dont 62 à Paris.
Près de 5.000 policiers seront mobilisés ce samedi à Paris, selon David Michaux, secrétaire national CRS Unsa Police, une information confirmée par Alternative police, un autre syndicat de policiers.
"On s'attend à des dispositifs de maintien de l'ordre costauds. Il y a énormément d'appels à la haine sur les réseaux sociaux. On s'attend à des débordements et des violences très graves", a dit David Michaux à Reuters. "Samedi dernier, c'était déjà cauchemardesque".
DÉBORDEMENTS DANS D'AUTRES SECTEURS
Il précise qu'il a été demandé aux cafés de fermer les terrasses. Certains commerces barricadaient leurs vitrines. La Ville de Paris ajoute qu'elle a reçu pour consigne de retirer tout ce qui pouvait servir de barricade.
"Il était temps que le ministre de l'Intérieur prenne ses responsabilités et organise les choses pour que samedi (...), on puisse tranquillement, si on le souhaite, manifester", a dit Colombe Brossel, adjointe à la maire de Paris, sur France Bleu.
L'Unsa Police craint pour sa part que la sécurisation des Champs-Elysées ne pousse les casseurs à se retrancher sur d'autres endroits pour se livrer à des exactions.
La CGT a appelé à une manifestation interprofessionnelle à 12h00, place de la République, pour grossir la "marche des chômeurs" prévue chaque premier samedi de décembre.
Elle souhaite que les "Gilets jaunes" s'y joignent pour dénoncer la hausse de la précarité, réclamer une baisse des taxes et une augmentation du smic.
"Les revendications des 'Gilets jaunes' se sont affinées et sont aujourd'hui très sociales. Il y en a beaucoup sur lesquelles on est en phase et on peut faire des choses ensemble", a dit à Reuters le secrétaire confédéral de la CGT, Fabrice Angéi.
Il juge par ailleurs que les "Gilets jaunes" n'obtiendront pas gain de cause avec pour seules mobilisations des blocages de ronds-points. "Il faut bloquer l'économie par des grèves", dit-il. Et pour cela, "il faut l'aide des syndicats".
UN SOUTIEN GRANDISSANT DANS L'OPINION
Les contacts entre syndicalistes et "Gilets jaunes" sont encore limités, mais "il y a eu une dizaine d'appels conjoints" en France, ajoute ce haut placé de la CGT.
Le syndicat étudiant Unef et quatorze associations d’étudiants étrangers se retrouveront aussi devant le Panthéon pour manifester contre la hausse des frais d’inscription à l’université de ces derniers.
La mobilisation est en baisse depuis le 17 novembre, date de la première journée de manifestations lors de laquelle près de 300.000 personnes ont bloqué les routes. Elles étaient un peu plus de 100.000 le 24 septembre dont 8.000 à Paris.
Mais, les rencontres entre le Premier ministres et des représentants du mouvement vendredi n'ont pas été concluantes, laissant présager un regain de colère.
Seuls deux "Gilets jaunes" sur les huit invités ont accepté de venir à Matignon. L'un d'entre eux a coupé court à l'entretien après le refus que cette discussion soit retransmise en direct à la télévision.
Emmanuel Macron a annoncé en marge de son déplacement en Argentine pour le G20, qu'il prendrait "des décisions supplémentaires dans les semaines et mois à venir mais elles ne seront jamais des reculs, mais d'une intensité plus grande encore".
Le soutien dans l'opinion pour le mouvement est par ailleurs grandissant.
D'après une enquête Odoxa-Dentsu Consulting pour franceinfo et Le Figaro, 84% des Français jugent justifié le mouvement, soit une progression de dix points par rapport au 16 novembre dernier qui montre que la réponse d'Emmanuel Macron à la grogne sociale est loin d'avoir convaincu, une tendance confirmée par un sondage Elabe pour BFM TV.
(Caroline Pailliez, avec Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)