Renault a bouclé mardi la "réunion de la dernière chance" pour convaincre sur son projet d'accord de compétitivité, la parole revenant désormais aux syndicats qui se prononceront dans les prochaines semaines.
Ce projet d'accord, potassé de longue date par la direction et discuté avec les syndicats depuis l'automne, "permettra de doter Renault d'un socle solide et durable pour ses activités industrielles, ingénieries et tertiaires en France", a assuré Gérard Leclercq, direction des opérations France, en échange d'efforts consentis par les salariés.
"Si nous arrivons à un accord, la mise en oeuvre des mesures proposées nous fera gagner environ 300 euros par voiture produite en France", dit-il. En dépit d'un recul de son chiffre d'affaires de 3,2%, le deuxième constructeur automobile français a réussi à se maintenir dans le vert en 2012 alors que le marché est en berne.
Alors que le texte du projet doit être remis mercredi aux syndicats, avant une signature éventuelle dans les prochaines semaines, la direction a réitéré mardi ses engagements en cas de réussite de l'accord: aucune fermeture d'usines en France, 8.260 suppressions de postes d'ici 2016 (7.500 suppressions d'emplois nettes) sans recourir à un plan social ni à un plan de départs volontaires, attribution à des usines françaises de 80.000 véhicules supplémentaires venant de partenaires (qui pourraient être Nissan et Daimler), maintien des activités coeur de métier (ingénierie et tertiaires) en France.
La direction s'est engagée, en cas d'accord, à "assurer un niveau de production minimum de 710.000 véhicules par an à l'horizon 2016, dont 110.000 à l'usine de Flins, qui bénéficierait de la localisation de versions de Clio IV à forte valeur ajoutée".
Le projet d'accord complet sera présenté mercredi aux syndicats. Le texte devrait ensuite être présenté pour consultation au comité central d'entreprise et dans les comités d'entreprise des filiales concernées (à la mi-mars, selon une source syndicale), "préalable à la signature entre les organisations syndicales et le président du groupe Renault, Carlos Ghosn", a indiqué la direction, selon qui "cette signature pourrait intervenir dans les prochaines semaines".
Les syndicats se tournent vers leurs équipes
Sous la pression de syndicats qui exigeaient des engagements écrits sur les volumes de production, la direction avait indiqué que des productions de versions conduite à droite de Clio IV actuellement assurées par le site de Bursa (Turquie) seraient rapatriées et qu'une partie de la production assurée par le site de Caccia au Portugal, serait transférée à Cléon.
Après avoir également accepté que le déplacement de salariés d'un site à un autre se fasse uniquement sur la base du volontariat, la direction est revenue mardi sur certains points de la politique salariale. Elle a ainsi renvoyé aux négociations annuelles la question des augmentations salariales pour 2014 et 2015.
La semaine dernière, alors que les négociations peinaient à trouver une issue favorable, le PDG de Renault, Carlos Ghosn, avait proposé de différer à fin 2016 le paiement de 30% de la part variable de sa rémunération de l'an passé, en cas d'accord (en 2011, la part variable de son salaire était de 1,59 million d'euros et la part fixe de 1,23 million). "Il ne s'est pas engagé sur plusieurs années, alors on ne voit pas pourquoi les salariés devraient en faire autant", a relèvé Dominique Chauvin, délégué central CFE-CGC.
Comme FO, le syndicat de cadre (majoritaire dans le groupe) ne s'est pas engagé mardi, voulant sonder les équipes, et faire étudier le texte de projet d'accord par des juristes avant de se prononcer.
La CGT a appelé les salariés à "exprimer leur point de vue". Dans un communiqué, la centrale dénonce cet accord, qu'elle qualifie de "nouvelle régression sociale", ainsi que "la délocalisation et externalisation des métiers déclarés non coeur de métier à l'ingénierie" avec 2.500 suppressions dans l'ingénierie de Renault. Il n'existe donc aucune contrepartie aux reculs sociaux imposés par cet accord", estime la CGT.
La CFDT a jugé de son côté dans un communiqué le projet d'accord "globalement équilibré", le syndicat précisant qu'il arrêterait sa position sur la signature "après consultation de ses équipes".
Pour être validé, l'accord doit être signé par au moins deux syndicats représentant 30% des salariés. La CFE-CGC dispose de 29,7% des voix des salariés devant la CGT (25,2%°), la CFDT (19,1%) et FO (15,6%).