par Gérard Bon
PARIS (Reuters) - Ni la charge frontale menée par le gouvernement, ni les dérapages de candidats Front national, ni les soupçons de fraude au Parlement européen ne semblent avoir enrayé la campagne du parti de Marine Le Pen pour les élections départementales.
A deux jours du scrutin, plusieurs sondages confortent les espoirs du FN d'arriver en tête au premier tour devant l'UMP, de faire élire des dizaines d'élus et d'emporter au moins un département, au premier rang desquels l'Aisne.
Si c'était le cas, "ça serait un gain extraordinaire", a commenté lundi Marine Le Pen, qui encourage à voter FN "pour faire vaciller le gouvernement".
Selon une enquête Ifop pour Le Figaro et Europe 1, 30% des sondés se prononcent pour le parti de Marine Le Pen, 29% pour l'UMP-UDI et 19% pour le PS.
"Il n'y a pas de décrochage du FN, il ne dévisse pas et restait autour de 29% à 30% alors même que le Premier ministre Manuel Valls sonnait la charge", contre lui, note Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion à l'Ifop.
Le parti frontiste a essuyé une charge virulente de Manuel Valls mettant en garde contre le "danger immense" d'un parti "aux portes du pouvoir", tandis que François Hollande appelait de son côté à "arracher" les électeurs au FN.
"J'ai peur pour mon pays, j'ai peur qu'il se fracasse contre le Front national", a ajouté le Premier ministre, une formule qui lui a valu des critiques de tous bords, y compris au PS.
"LE FN AU CENTRE DU JEU"
Pour Jérôme Fourquet, Manuel Valls a essentiellement cherché à "sonner le tocsin des électeurs de gauche tentés par l'abstention" et à créer "la même dynamique que lors de la législative partielle du Doubs", gagnée sur le fil par le PS.
"Mais si le but était 'd'arracher les électeurs au FN', comme l'a dit Hollande, c'était raté. Valls avait déjà sonné la charge aux dernières municipales et ça n'avait pas enrayé la progression du FN", souligne-t-il.
Cette mobilisation peut également se révéler contre-productive, "car elle remet le Front national au centre du jeu", ajoute le responsable du département Opinion de l'Ifop.
De même qualifie-t-il de "grains de sable" les dérapages sur les réseaux sociaux d'une vingtaine de candidats FN tenant de propos racistes, antisémites ou homophobes.
"Ça peut servir de piqûre de rappel auprès des Français qui n'envisagent pas de voter FN. Mais pour ceux qui ont déjà basculé, ce n'est pas le sujet", dit-il.
Pour Marine Le Pen, qui assure que, même s'ils venaient à être élus, les auteurs des dérapages ne pourront plus se revendiquer du FN, il s'agit "d'un os à ronger", alors que son parti présente 7.650 candidats au total.
L'état-major du parti frontiste a d'abord semblé plus embarrassé par la décision du président du Parlement européen, Martin Schulz, de saisir l'Office européen de lutte anti-fraude au sujet des assistants parlementaires de 23 eurodéputés FN soupçonnés de travailler en fait pour le parti.
Mais très vite, la députée FN Marion Maréchal-Le Pen a accusé Manuel Valls d'être derrière ces accusations tandis que le parti accusait Martin Schulz de frauder de la même façon avec son propre assistant parlementaire.
Pour Jérôme Fourquet, cette campagne a fait long feu. "Le fait qu'elle sorte à une semaine du premier tour, ça fait un peu téléguidé", explique-t-il.
"Les Français se disent que tous les partis doivent fonctionner de la sorte", ajoute-t-il en rappelant l'affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris et le fait que "l'ossature du PS est constituée" par des cadres municipaux ou départementaux.
(Edité par Yves Clarisse)