Le président chinois, Hu Jintao, est attendu jeudi après-midi en France pour une visite de trois jours en grande pompe qui doit sceller la nouvelle lune de miel entre les deux pays par plusieurs milliards d'euros de contrats au bénéfice des entreprises tricolores.
Tapis rouge, escorte de Gardes républicains à cheval, mais pas de conférence de presse. Le protocole a réglé la mise en scène de la deuxième visite d'Etat du numéro un chinois en France pour en faire un succès sans ombre, et tirer un trait sur la brouille née en 2008 du passage agité de la flamme olympique à Paris et de la rencontre entre Nicolas Sarkozy et le dalaï lama.
Signe de l'importance qu'il accorde à ce séjour, c'est le chef de l'Etat lui-même et son épouse Carla qui accueilleront M. Hu et la Première dame de Chine, Liu Yongqing, à leur arrivée à 13H30 à l'aéroport d'Orly.
Le temps d'une rapide halte dans sa suite de l'hôtel George V et le président chinois entrera dans le vif du sujet avec un premier entretien à 17H00 à l'Elysée largement consacré aux dossiers bilatéraux et qui se conclura par la signature d'une série d'accords commerciaux.
Même si ces méga-contrats cachent mal le déséquilibre des relations économiques entre la Chine et l'Europe, l'Elysée a lâché avec gourmandise que leur montant serait "de loin plus important que lors des précédentes visites des dirigeants européens à Pékin ou chinois à l'étranger". A titre de comparaison, la première visite de Nicolas Sarkozy à Pékin fin 2007 s'était soldée par une moisson de 20 milliards d'euros.
Avant l'arrivée de M. Hu, le bal des contrats a été ouvert par l'équipementier télécoms Alcatel-Lucent, avec trois contrats pour 1,1 milliard de dollars avec trois opérateurs chinois, suivi par Airbus, avec 36 avions vendus à la compagnie China Southern Airlines pour 3,78 milliard de dollars de plus. Le numéro un mondial du nucléaire Areva espère suivre avec la fourniture de 3 milliards d'euros d'uranium à l'électricien chinois CGNPC.
Cette première journée s'achèvera par un dîner d'Etat avec smokings et toasts officiels, qui constitueront la seule prise de parole publique des deux chefs d'Etats pendant cette visite.
L'Elysée a eu beau jurer qu'aucun sujet n'était "tabou" entre les deux pays, les ONG ont vu dans cette discrétion le signe que la France avait bradé la défense des droits de l'Homme sur l'autel de ses intérêts économiques et dénoncé un "scandale" ou un "reniement".
Ces associations ont également reproché à Nicolas Sarkozy d'avoir choisi le silence après l'attribution du prix Nobel de la paix 2010 au dissident chinois emprisonné Liu Xiaobao, pour ne pas froisser son invité et s'attirer ses bonnes grâces à quelques jours de la présidence française du G20.
Les grandes questions internationales de l'heure et les priorités de cette présidence, notamment sur la question sensible des monnaies, doivent constituer le plat de résistance d'un nouvel entretien entre MM. Hu et Sarkozy vendredi après-midi à Nice, que le numéro chinois a souhaité découvrir.
Pour engager la réforme du système monétaire international qu'il appelle de ses voeux et réussir "son" G20, le chef de l'Etat est contraint de composer avec la Chine, qui refuse jusque-là de reconnaître la sous-évaluation de yuan. "La politique de change de la Chine est cohérente et responsable", a encore réaffirmé Hu Jintao au Figaro à la veille de son arrivée à Paris.
Mais comme sur les droits de l'Homme, il a choisi une approche conciliante. "Rien ne peut se régler sans le concours de la Chine", résume un proche de Nicolas Sarkozy. "Mais il faut éviter d'aller à l'affrontement, qui ne règle rien", ajoute-t-il, "et plutôt avancer par le dialogue".