L'Espagne a laissé la crise derrière elle en 2014, avec une croissance de 1,4%. Mais la reprise est loin d'être visible pour tous les Espagnols et le chômage pèse en cette année électorale cruciale.
L'économie espagnole a rompu avec cinq années de récession ou de croissance nulle et a fait partie l'an dernier des plus dynamiques de la zone euro, derrière l'Allemagne.
Selon une première estimation publiée vendredi par l'Institut national de la statistique (Ine), la croissance du produit intérieur brut (PIB) a accéléré à 0,7% au dernier trimestre de l'année comparé au précédent, ce qui a permis d'atteindre le chiffre de 1,4% sur l'année.
Ces chiffres sont conformes aux prévisions du gouvernement conservateur. "Ces données sont bonnes et montrent que la croissance accélère", s'est félicité le secrétaire d'Etat à l'Economie Iñigo Fernandez de Mesa, interrogé sur la chaîne de télévision TVE.
Madrid table sur une croissance de 2% cette année. Mais le ministre de l'Economie Luis de Guindos a déjà annoncé que ces prévisions pourraient être revues à la hausse en avril, jusqu'à 2,5%.
L'Espagne, gros importateur d'énergie, profite à plein de la dégringolade des cours du brut, tandis que le taux de change plus favorable de l'euro soutient ses exportations. La baisse des impôts des particuliers et des entreprises entrée en vigueur cette année devrait aussi soutenir la croissance, estime Raj Badiani, analyste chez IHS, dans une note.
Mais le pays reste englué dans le chômage de masse qui touche 23,7% de la population active. Le taux de chômage des jeunes de moins de 25 ans est encore plus dramatique et atteint 51,8%.
Si les entreprises ont recommencé à créer des emplois, il ne faudrait pas qu'elles s'en tiennent à "une hausse des contrats temporaires, des bas salaires", s'inquiète l'analyste.
- La crainte de la déflation -
Un autre défi que doit affronter l'Espagne est la déflation, signe pour Jonathan Loynes, économiste chez Capital Economics, que la reprise n'est pas aussi solide qu'elle n'y paraît. "L'Espagne reste une des économies les plus faibles en terme du niveau d'activité", selon lui, avec un PIB de près de 6% inférieur à son niveau de 2008.
Les prix à la consommation ont baissé en janvier pour le septième mois consécutif, de 1,5% sur un an. L'entrée dans une spirale prolongée de baisse des prix et des salaires aurait des conséquences économiques, mais aussi politiques, avertit l'économiste, si elle conduit à "une augmentation supplémentaire de la popularité du parti de gauche radicale Podemos".
Ce nouveau parti talonne dans les sondages le Parti populaire au pouvoir et dépasse largement les socialistes du PSOE, alors que se tiendront en 2015 des élections municipales, régionales et législatives.
Il faudra atteindre fin février et la publication du chiffre définitif du PIB pour savoir quels ont été les secteurs d'activité les plus dynamiques en 2014.
Dans son bulletin mensuel de janvier, la Banque d'Espagne soulignait la bonne tenue de la demande intérieure. Les ventes de détail ont enregistré une légère hausse de 1% l'an dernier, les ménages recommençant à s'équiper en voitures, en électro-ménager ou en biens électroniques après s'être serrés la ceinture pendant la crise.
Les entreprises elles aussi ont recommencé à investir pour pouvoir répondre à cette demande.
Le secteur de la construction, dévasté après l'éclatement de la bulle immobilière en 2008, repart de l'avant, tandis que le tourisme, autre secteur clé, a enregistré un nombre record d'arrivée de voyageurs étrangers et que la production automobile a renoué avec ses niveaux d'il y a cinq ans.
Cette reprise de la consommation interne se couple à une bonne tenue des exportations. "L'Espagne a gagné des parts de marché à l'exportation" grâce à l'amélioration de la compétitivité de ses entreprises, relève l'analyste d'IHS. Elles ont aussi renforcé leur présence sur les marchés émergents, une bonne chose au moment où son principal partenaire commercial, l'Union européenne, est en plein marasme.