par Yves Clarisse
PARIS (Reuters) - En une semaine, le scénario d'un "remake" en 2017 du film de l'élection présidentielle de 2012 a été écrit, avec Nicolas Sarkozy et François Hollande dans les premiers rôles pour empêcher Marine Le Pen d'être au second tour.
L'actuel président est désormais quasiment assuré de pouvoir se représenter dans deux ans sans passer par une primaire socialiste qui risquait de tourner à la foire d'empoigne.
La motion "loyaliste" du premier secrétaire du Parti socialiste, a obtenu 60% des voix des militants le 21 juin et a été rejointe par celle de Karine Berger (9,5%), permettant à Jean-Christophe Cambadélis d'obtenir un score très confortable (70,1%) jeudi pour son élection.
Or, ces deux motions ne prônent pas la tenue d'une primaire socialiste, contrairement à celle des frondeurs.
Le Parti socialiste, qui tiendra congrès à Poitiers du 5 au 7 juin, ne devrait pas connaître à cette occasion les déchirements publics dont il est coutumier.
François Hollande peut s'atteler à préparer l'échéance suprême, ce qu'il a commencé à faire en promettant de la "redistribution" qu'il espère pouvoir mener à bien grâce au retour de la croissance et une baisse du chômage attendue.
Pour François Miquet-Marty, de l'institut de sondages Viavoice, les frondeurs ont échoué à renverser la table et l'autorité du président sort confortée du vote.
"On a un rapport de force qui est nettement favorable à la ligne Hollande-Valls", dit l'analyste, pour qui "cela facilite l'idée d'une candidature Hollande en 2017".
"REPUBLIQUE DE CONFIANCE"
En outre, contrairement à ce qui s'est passé en 2012 et à la situation qui prévaut actuellement dans un pays comme l'Espagne, la "gauche de la gauche" peine à faire son unité.
Les "frondeurs" du PS, qui avaient un temps caressé l'espoir d'une alliance à gauche, ont été désavoués par les militants.
Jean-Luc Mélenchon qui, au nom du Front de gauche, avait réuni 11,1% des voix au premier tour en 2012, est à couteaux tirés avec la dirigeante écologiste Cécile Duflot qui envisageait une alliance avec lui pour 2017.
François Hollande, qui sait qu'il est crucial de rassembler la gauche pour passer l'obstacle du premier tour, surtout dans l'état où est sa popularité (autour de 20% de satisfaits), peut donc, si la situation ne change pas, compter sur un PS en ordre de marche pour 2017 et une "gauche de la gauche" peu menaçante.
A droite, les chances de Nicolas Sarkozy de retrouver l'Elysée ont été dopées samedi par le congrès de sa formation, dont les militants ont décidé de s'appeler "Les Républicains".
"La France ne peut pas être condamnée à choisir entre le terrifiant spectacle du drame familial des Le Pen et la terrifiante médiocrité de ceux qui nous gouvernent", a lancé l'ex-président sous les applaudissements de quelque 15.000 cadres et militants réunis à Paris.
"Je vous propose de construire la République de la confiance", a-t-il ajouté après avoir fustigé en termes vifs l'"abandon" et la "trahison" de la République par la gauche.
Les statuts du principal parti d'opposition prévoient une primaire pour désigner son candidat à la magistrature suprême et les anciens Premiers ministres Alain Juppé et François Fillon disent vouloir aller jusqu'au bout.
"Nicolas Sarkozy a le parti, moi pour l'instant j'ai l'opinion", a dit le maire de Bordeaux dimanche dans l'émission "Le Grand rendez-vous Europe 1-iTELE-Le Monde". J'organise ma petite PME, parfois il arrive que des PME performantes soient plus efficaces que des grandes entreprises du CAC 40".
AFFAIRES JUDICIAIRES
Alain Juppé peut trouver des raisons d'espérer dans les sondages.
L'ancien Premier ministre battrait Nicolas Sarkozy de dix points (55-45) lors de la primaire de novembre 2016 qui désignera le candidat de la droite et du centre à l'élection présidentielle de 2017, selon un sondage Odoxa publié le 24 mai dans Le Parisien.
Au premier tour, Alain Juppé et Nicolas Sarkozy obtiendraient chacun 39%, devant Bruno Le Maire (12%), François Fillon (5%), Xavier Bertrand (3%) et Nathalie Kosciusko-Morizet (2%).
Mais Nicolas Sarkozy sait que les militants du parti lui sont majoritairement fidèles et qu'il a deux ans pour, de meeting en meeting, monter en puissance et décourager ses adversaires d'aller à la bataille de la primaire.
Tout comme François Hollande, il espère empêcher une candidature centriste en 2017 pour rassembler son camp, ce qui semble a priori plus facile avec le leader de l'UDI Jean-Christophe Lagarde qu'avec François Bayrou en 2012.
Toute cette stratégie pourrait toutefois s'effondrer si les multiples affaires qui éclaboussent Nicolas Sarkozy débouchent sur une nouvelle mise en examen, voire un procès et donner à Alain Juppé une chance de vaincre sans combattre.
Mais pour se retrouver au second tour, François Hollande et Nicolas Sarkozy devront toutefois dépasser le score de Marine Le Pen, qui a fait la course en tête aux élections européennes, le seul scrutin comparable à une présidentielle.
Nicolas Sarkozy entend mener une campagne décomplexée, comme l'ont montré tous ses derniers meetings, où les thèmes de prédilection du Front national ont été largement évoqués.
Son espoir est de capter le vote FN, comme il l'avait réussi en 2007, lorsque Jean-Marie Le Pen n'avait réuni que 10,44% des voix, lui permettant de récolter sur son nom 31,18% des votes au premier tour, un score suffisant pour assurer sa victoire.
La stratégie de "dédiabolisation" menée par sa fille devrait toutefois lui permettre de faire mieux encore que son score du premier tour de 2012 (17,90%), les sondages la donnant systématiquement au second tour en 2017.
(Edité par Marine Pennetier)