par Simon Carraud
PARIS (Reuters) - Les gestionnaires de la salle de spectacles du Bataclan, où 90 personnes ont été tuées lors des attaques du 13 novembre, disent vouloir rouvrir dans un an, au terme d'un "long chemin de croix", mais le souvenir de la tuerie plane sur le lieu.
Les gérants de plusieurs établissements -- bars et restaurants -- frappés le mois dernier ont fait part via les réseaux sociaux et la presse de leur souhait de reprendre leur activité au plus vite.
Dans une interview publiée mercredi par Le Monde, Jules Frutos et Olivier Poubelle s'interrogent en revanche sur l'avenir du Bataclan, qu'ils dirigent depuis 2004 et dont ils sont actionnaires à hauteur de 30%, le reste appartenant à Lagardère Unlimited Live Entertainment.
"Les équipes veulent une reconstruction, les artistes aussi. On en parle beaucoup. Il y a un désir de Bataclan et de retrouvailles", dit Jules Frutos. "Mais ce sera un long chemin de croix."
"Beaucoup de questions se posent. Quelle salle rouvrir ? Que faire du hall ? Quelle configuration ? Quelle couleur ? Quelle circulation ? Quels accès ? Quels artistes ?", ajoute-t-il.
Le Bataclan semble figé depuis les attentats. Les badauds continuent de s'y rendre comme en pèlerinage, le boulevard Voltaire tient lieu de mémorial où flotte une odeur de bougie et on peut encore voir des impacts de balles dans la rue qui longe les sorties de secours.
Pour Olivier Poubelle, le retour à la normale, au moins en apparence, constitue un "besoin".
"Sur Facebook (O:FB), des milliers de témoignages nous appellent à rouvrir. La reconstruction, c'est un objectif qui nous aide à tenir", estime-t-il. "Nous espérons vivement (rouvrir-NDLR) à la fin 2016."
CONCERT INTERROMPU
Emilie, une habituée du Bataclan rencontrée mercredi devant la salle, est partagée entre le sentiment qu'il faudra y revenir, pour faire comme avant dit-elle, et l'appréhension.
"Je ne sais pas ce que je ferai", juge la jeune femme. "Au moins au début, on aura forcément des images qui se bousculeront dans la tête. Ce n'est pas facile à dire maintenant, il faut que le temps fasse son travail."
Les deux programmateurs expliquent avoir décliné une proposition du ministère de la Culture d'organiser un concert en hommage aux victimes pour éviter, selon Jules Frutos, "la mise en spectacle de ces attentats, qui est déjà assez forte comme ça".
La batteur du groupe Eagles of Death Metal, qui jouait au Bataclan le soir des attentats, s'est récemment déclaré, sur l'application de partage de photos Instagram, impatient d'y finir le concert interrompu par l'irruption dans la salle de trois assaillants armés de fusils d'assaut.
Le nom du groupe apparaît encore en grosses lettres sur la façade bariolée.
Le café Bonne bière, dans le XIe arrondissement, a prévu d'ouvrir vendredi. "Il est temps pour nous de nous retrouver ensemble, unis et d'avancer pour ne pas oublier", peut-on lire sur le compte Facebook de l'établissement.
En attendant, les travaux se poursuivent dans le bar.
Les gérants du restaurant Le Petit Cambodge et du Carillon, deux établissements du Xe arrondissement qui se font face, envisagent également une réouverture prochaine, mais n'ont pas donné de date précise.
Les attaques revendiquées par le groupe Etat islamique ont fait 130 morts et plusieurs centaines de blessés aux abords du Stade de France (Seine-Saint-Denis), devant des cafés et des restaurants de l'Est parisien et au Bataclan.
(Edité par Yves Clarisse)