Malgré l'hostilité du patronat et les réticences des syndicats, le gouvernement se dit déterminé à contraindre par la loi les entreprises distribuant des dividendes à verser une prime à leurs salariés, pour améliorer le pouvoir d'achat des Français.
"C'est la volonté du gouvernement de mieux répartir les résultats des bénéfices des entreprises qui sont importants cette année", a assuré jeudi le ministre du Budget, François Baroin.
Il est désormais "acté", a-t-il souligné, qu'une loi de finances rectificative en juin comprendra des mesures pour que "les salariés profitent pleinement et mieux de l'augmentation" de ces bénéfices.
La veille, développant une idée avancée par le président Nicolas Sarkozy, il avait évoqué une prime d'au moins 1.000 euros que devraient verser à leurs salariés les entreprises distribuant des dividendes.
Les grandes organisations patronales françaises, le Medef et la CGPME, ont affiché jeudi leur hostilité à ce projet, en refusant que l'Etat se mêle d'un sujet qui relève, selon eux, des partenaires sociaux.
Côté syndical, la CFTC et la CFDT avaient déploré mercredi que la proposition gouvernementale laisse de côté un grand nombre de salariés, la CGT et FO réclamant, à la place, une "augmentation des salaires".
"La priorité du gouvernement", a souligné jeudi François Baroin, "c'est améliorer le pouvoir d'achat des Français", actuellement miné par les multiples hausses de prix et la faible évolution des salaires.
Or "la seule parole politique ne semble pas suffire pour encourager à mieux répartir la richesse des entreprises", a-t-il affirmé.
D'où "la détermination du gouvernement à obtenir des résultats en matière d'amélioration du pouvoir d'achat par des mesures de nature législative pour favoriser et encourager la négociation collective (...) au niveau des entreprises", a-t-il poursuivi.
La présidente du Medef, Laurence Parisot, avait plus tôt dénoncé des "propos incompréhensibles" et un projet qui serait "très dangereux pour l'emploi".
Les entreprises du CAC 40 engrangent environ 80 milliards d'euros de profits annuels et versent 40 milliards d'euros de dividendes à leurs actionnaires.
"Nous estimons qu'une bonne partie de cet argent, naturellement par la voie de la négociation, doit être redistribué aux salariés", a indiqué le ministre du Budget.
"Le montant de la masse salariale" payée par les entreprises est de "220 milliards d'euros, on est dans quelque chose qui vraiment ne se compare pas", a argué de son côté Mme Parisot.
La présidente du Medef a aussi estimé qu'une telle mesure pourrait être fatale aux petites entreprises, soulignant par exemple que pour une PME de 300 personnes, 300.000 euros représentaient souvent l'intégralité de son bénéfice.
"Une prime obligatoire, cela voudrait dire qu'une fois de plus l'Etat s'immiscerait dans nos entreprises", a aussi déploré Jean-François Roubaud, président de la CGPME, qui représente les petites et moyennes entreprises.
François Baroin a tenté de rassurer: "On n'est pas dans une économie administrée, c'est un gouvernement d'inspiration libérale", a-t-il rappelé, promettant que l'Etat n'allait "rien imposer en tant que tel", mais "favoriser la négociation".
C'est au moment des négociations au sein des entreprises que sera défini le montant des primes à verser, a-t-il indiqué, après avoir pourtant lancé le chiffre de 1.000 euros.
Quant aux modalités de mise en oeuvre d'une telle mesure, elles ne sont pas encore tranchées. La ministre de l'Economie, Christine Lagarde, qui planche sur le sujet avec le ministère du Travail, a simplement évoqué mercredi des incitations fiscales et sociales.