A quelques jours du premier tour de l'élection présidentielle française et sur fond d'inquiétude en zone euro, la nervosité s'accentue à la Bourse de Paris, mais sans excès, les programmes des deux principaux candidats laissant les investisseurs plutôt neutres.
Depuis trois semaines l'indice vedette parisien ainsi que les valeurs bancaires ont effacé quasiment tous leurs gains accumulés depuis le début de l'année. Mais la place de Paris n'est pas la seule concernée par ce repli.
Difficile dans ce contexte de faire la part des choses entre le repli lié aux turbulences en zone euro avec le retour des craintes sur l'Espagne, et celui qui s'explique par l'incertitude sur l'issue de la campagne électorale en France, souligne-t-on dans les salles de marché.
"Ces deux facteurs se télescopent et s'alimentent l'un l'autre, créant une très forte nervosité", souligne Jean-Louis Mourier, économiste chez Aurel.
Mais avec les derniers sondages qui donnent en tête le candidat socialiste François Hollande devant l'actuel président Nicolas Sarkozy, "le climat est devenu plus lourd et s'illustre par une pression supplémentaire sur les valeurs bancaires", commente Xavier de Villepion, vendeur d'actions chez Global Equities.
Sur les marchés actions, les banques sont en effet considérées comme des baromètres de la confiance, étant très sensibles à tout changement de l'environnement économique. En outre, elles sont, dans le cas de l'élection 2012, susceptibles d'être en ligne de mire en cas de victoire de la Gauche. Le candidat socialiste s'est en effet engagé à créer une nette séparation entre les opérations spéculatives des banques et leurs autres activités, ce qui pourrait peser sur leurs résultats.
Très loin de l'ambiance de 1981
"Nervosité certes, mais aucune panique n'est constatée sur les marchés", fait remarquer Guillaume Garabédian, gestionnaire de portefeuilles chez Meeschaert Gestion Privée, car "les programmes des deux candidats ne suscitent aucun enthousiasme particulier dans un sens ou l'autre".
Quant aux éventuels parallèles avec l'élection de François Mitterrand en 1981 quand le marché avait chuté de plus de 20% après le 10 mai, ils ne sont pas pertinents pour de nombreuses raisons. "En 1981 les investisseurs ont été pris par surprise par la victoire des socialistes, il y avait un programme commun de la Gauche et les marchés n'étaient pas mondialisés", ajoute M. Garabédian.
Rien de tel aujourd'hui. C'est avant tout le facteur incertitude qui pèse sur les marchés davantage que le programme de tel ou tel candidat ou les conséquences de son arrivée au pouvoir.
Dans le cas de François Hollande l'incertitude est aggravée par les interrogations sur le score de Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche à l'Elysée. Pour M. Mourier, cette interrogation et la manière dont François Hollande se positionnera par rapport à l'électorat de M. Mélenchon dans l'entre-deux tours provoquera une forte volatilité sur le marché actions.
C'est à ce niveau que les investisseurs risquent d'être inquiets et que des réactions seront notées à la Bourse mais également sur le marché obligataire, baromètre de la confiance des investisseurs internationaux.
Une remontée des taux à 10 ans de la France témoignerait d'une méfiance des marchés et notamment des investisseurs internationaux, Américains en tête. Pour l'instant ces taux restent très bas, évoluant autour de 3% et aucune tension particulière n'a été constatée ces derniers jours.
En fait ce que les investisseurs veulent, "c'est une remise en ordre des finances publiques sans casser la croissance, une quadrature de cercle face à laquelle MM. Hollande et Sarkozy n'ont aucune solution satisfaisante", indique M. Mourier.
Dans ces conditions, les marchés n'affichent pas de préférence particulière pour l'un ou l'autre des candidats, résume-t-il.