Des grèves, manifestations et émeutes avaient lieu mercredi en Jordanie, après une nuit marquée par des protestations ayant dégénéré en violences à la suite d'une augmentation des prix du carburant et du gaz.
Le gouvernement a annoncé mardi soir une hausse des prix de l'essence --de 0,71 dinar à 0,80 dinar (0,88 euro)-- et de la bonbonne de gaz domestique --de 6,5 dinars à 10 dinars (11 euros), soit + 53% --.
Cette soudaine augmentation, suivie de celle de 11% des prix des transports publics, a suscité la condamnation des Frères musulmans, principale force de l'opposition, qui a mis en garde contre un mouvement de "désobéissance civile" à quelques semaines des élections législatives de janvier qu'ils entendent boycotter.
Un responsable de la sécurité a fait état d'"émeutes violentes" mercredi dans les villes de Karak, Tafileh et Maan, dans le sud du pays.
"Des émeutiers ont attaqué un commissariat à Theiban, alors que d'autres ont bloqué une route principale dans le désert", a-t-il ajouté, précisant que les forces anti-émeutes avaient dispersé les manifestations.
A Amman, des protestataires bloquaient la principale rue du centre-ville.
Les islamistes et d'autres groupes ont essayé de manifester près du ministère de l'Intérieur, sur la place Gamal Abdel Nasser, où 24 personnes avaient été arrêtées mardi soir après une manifestation ayant réuni plus de 2.000 personnes. Mais la police anti-émeutes a bouclé le secteur, provoquant des embouteillages et empêchant les protestataires d'approcher.
"Nous sommes en état d'alerte et cette place sera bouclée au moins jusqu'à (jeudi) matin", a déclaré un policier à l'AFP.
L'ambassade des Etats-Unis a demandé à ses ressortissants d'éviter les zones où se tenaient des manifestations.
Dans la foulée du Printemps arabe, la Jordanie a été touchée depuis janvier 2011 par des manifestations, petites mais régulières, appelant à des réformes, mais celles de mardi et mercredi sont les plus violentes.
Grève dans les écoles
Environ la moitié des 120.000 professeurs des écoles publiques ont fait parallèlement grève mercredi, selon le syndicat d'enseignants, qui a assuré que le mouvement "continuera jusqu'à ce que le gouvernement revienne sur sa décision (...) irresponsable".
Des avocats ont aussi cessé le travail à Amman alors que d'autres syndicats envisageaient une action similaire.
Dans la nuit, des manifestations avaient fait 14 blessés, dont 10 policiers, après que des protestataires eurent attaqué un commissariat à Irbid (nord) et des bâtiments gouvernementaux à Salt, à l'ouest d'Amman.
La police a fait usage de gaz lacrymogène et de canons à eau pour disperser un rassemblement devant la maison du Premier ministre Abdallah Nsour à Salt, sa ville natale, ainsi que dans d'autres villes du pays.
Les manifestants demandaient la démission du gouvernement de M. Nsour qui a annoncé mardi un déficit budgétaire 2012 de 3,8 milliards d'euros et parlé d'une situation économique "très précaire".
"La décision de réexaminer les subventions sur le carburant aurait dû être prise il y a deux ans", a-t-il ajouté.
Le numéro deux des Frères musulmans, Zaki Bani Rsheid, qui avait qualifié mardi cette décision de la mesure "la plus dangereuse depuis dix ans", a parlé d'un "coup sévère pour les élections" législatives de janvier. "Le scrutin, déjà confronté à une crise, court un sérieux danger maintenant", a-t-il dit.
Les Frères musulmans ont décidé de boycotter les élections, réclamant une révision du système électoral qui privilégie, selon eux, les régions rurales, considérées comme loyales au gouvernement.
Ils réclament aussi un système parlementaire dans lequel le Premier ministre serait issu de la majorité du Parlement et non plus nommé par le roi.