Le tribunal de commerce de Paris a validé mardi le principe de la subvention des téléphones mobiles par les opérateurs en échange d'un engagement du client en déboutant l'opérateur Free, qui ne pratique pas cette subvention.
Free, qui attaquait son concurrent SFR pour "concurrence déloyale", dénonçait "le crédit à la consommation déguisé" que constituait, selon lui, le fait pour SFR de subventionner des mobiles.
L'opérateur a annoncé dès mardi qu'il ferait appel de cette décision.
Cette pratique, loin d'être l'apanage de la seule filiale de Vivendi, est fréquente chez de nombreux opérateurs qui proposent des forfaits avec un engagement, dont la durée va de 12 à 24 mois, en échange du fait de subventionner le téléphone portable choisi.
Free, qui a lancé son service mobile il y a un an avec des offres sans engagement, propose par contre le paiement comptant des téléphones mobiles ou un règlement échelonné, sans frais pour les mobiles à moins de 200 euros, et au-delà de ce montant "sans marge et avec un crédit à la consommation au taux raisonnable de 9,99%", a affirmé dans la presse Xavier Niel, patron d'Iliad, la maison-mère de Free.
Le groupe a été débouté mardi par le Tribunal de commerce de Paris qui l'a condamné à payer à SFR la somme de 300.000 euros de dommages et intérêts pour "préjudice d'image et de réputation", ainsi que 100.000 euros pour rembourser les frais de justice, une décision exécutoire, même en cas d'appel.
SFR s'est immédiatement félicité de cette décision qui "pérennise le modèle de la subvention mobile au moment où les Français vont devoir s'équiper en terminaux 4G", a indiqué un porte-parole.
Le tribunal de commerce a estimé que les pratiques commerciales de SFR ne répondaient pas à la définition d'une opération ou d'un contrat de crédit car "il n'y a pas prêt d'argent, SFR ne met aucune somme d'argent à la disposition du client contre remboursement, qui serait à la charge de ce dernier".
Pas "une pratique commerciale déloyale"
De la même manière, le jugement a réfuté l'argument de Free selon lequel la subvention des mobiles était une "pratique commerciale déloyale", estimant que les conditions de ventes n'étaient pas opaques mais qu'au contraire l'information que SFR délivrait au consommateur se "présentait de manière pertinente, simple, lisible et compréhensible".
L'UFC Que Choisir, qui s'est "battue pour l'interdiction de la subvention à un moment où il n'existait que des offres avec subvention", estime que "depuis début 2012 (et l'arrivée de Free Mobile, NDLR), on a des offres sans subvention à des prix de marché et il est moins important d'empêcher les subventions", explique le spécialiste des nouvelles technologies de l'association, Edouard Barreiro.
La multiplication des offres sans engagement chez tous les opérateurs, à la suite de celle de Free Mobile, permet en effet une alternative et ce qui est important aujourd'hui, c'est "que les consommateurs fassent leur travail d'acteurs de marché et qu'ils comparent bien les offres sans engagement, et celles avec un engagement et un téléphone", assure-t-il.
Le gouvernement s'était lui aussi emparé de la question de la subvention des terminaux. En octobre, la ministre de l'économie numérique Fleur Pellerin et son ministre de tutelle, Arnaud Montebourg, avaient indiqué qu'ils travaillaient sur des évolutions réglementaires concernant ce sujet.
Leurs objectifs étaient variés puisqu'ils souhaitaient en même temps modérer le rythme de renouvellement des portables, réajuster la valeur entre les opérateurs français et les fournisseurs de terminaux comme l'Américain Apple et le Coréen Samsung, et sécuriser juridiquement ce modèle de "subventionnement", tout ça dans "le plein respect de l'intérêt des consommateurs".