L'usine d'Amiens Nord de Goodyear va fermer, a annoncé la direction, menaçant 1.173 postes de travail, une nouvelle épreuve pour les salariés mais aussi pour le gouvernement confronté à une rafale de plans sociaux.
"La fermeture de l'usine est la seule option possible après cinq années de négociations infructueuses", a expliqué la direction après présentation de son projet au Comité central d'entreprise réuni au siège de Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine).
Elu CGT, Mickael Wamen a aussitôt appelé à la mobilisation, annonçant une "journée de lutte" le 12 février à l'occasion du prochain CCE.
"L'ensemble du site sera en grève" le 12 février, a annoncé l'élu. "On fera le déplacement ici-même (ndlr à Rueil-Malmaison) avec l'ensemble des salariés de Goodyear", a-t-il promis en souhaitant que l'ensemble des salariés des entreprises en difficulté se joignent à cette "nouvelle journée de lutte".
"On va se battre jusqu'au bout", a-t-il ajouté, en contestant le bien-fondé juridique d'une telle fermeture annoncée.
La direction de Goodyear France a pour sa part mis l'accent sur les difficultés du secteur, affirmant que son projet avait "pour objectif de sauvegarder la compétitivité des secteurs d’activité tourisme et agricole du groupe".
Devant quelques journalistes, Henry Dumortier directeur général de Goodyear Dunlop Tires France, a appelé "chacun à prendre ses responsabilités" et souhaité "la relance du dialogue social".
"Certaines organisations syndicales doivent se regarder dans le miroir", a-t-il dit. "Je leur lance un appel: +S'il vous plaît, arrêtons!+", a-t-il ajouté.
Le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg souhaite "ramener tout le monde à la table des négociations". Il a reçu les dirigeants de Goodyear et leur a demandé "de sursoir à l'exécution de ce plan pour laisser une dernière chance à la négociation".
Il espère réunir l'Etat, les syndicats, la direction de Goodyear et le repreneur potentiel Titan, avec qui les négociations ont échoué l'automne dernier.
"Je suis fatigué", lâche un salarié de l'usine Amiens Nord, après l'annonce du projet de fermeture. "Là, c'est le gros coup de massue, mais on va voir derrière ce qu'ils vont annoncer", avance Richard Jouhannet, secrétaire du CHSCT.
L'usine d'Amiens-Nord a perdu 61 millions d'euros en 2011, dont 41 pour le pneu de tourisme, explique-t-il, faisant un parallèle avec celle d'Amiens-Sud "aujourd'hui rentable", selon lui, après avoir accepté une organisation du travail différente (4X8) en contrepartie d'un plan d'investissement.
Depuis cinq ans toutes les négociations pour Amiens Nord ont échoué. En septembre dernier, après huit mois de discussions avec les syndicats, la direction de Goodyear France a annoncé le retrait d'un projet de plan de départs volontaires sans licenciements.
Avant cela, un plan social, qui prévoyait de mettre un terme à la production de pneus de tourisme à Amiens-Nord, avait été invalidé par la justice, saisie par la CGT.
Des négociations avec un éventuel repreneur, le groupe Titan, qui a repris l'essentiel des activités de pneus agricoles de Goodyear dans le monde, n'ont pas non plus abouti.
" Mon pote, fais ton boulot !"
Mercredi à l'Assemblée nationale, Arnaud Montebourg, a une nouvelle fois évoqué la piste Titan.
"Nous préférons le plan de départs volontaires et la reprise par Titan. Nous avons repris contact avec Titan", a-t-il dit.
"Depuis le début, nous avions raison, le plan Titan n'a jamais existé. La direction nous a menti", a réagi Mickael Wamen.
A l'adresse du ministre le syndicaliste a aussi lancé : "Arnaud Montebourg tu as dit que tu voulais éviter le pire. Mon pote, donc, tu prends ton copain Hollande et tu fais ton boulot !"
"Nous allons aller en justice nous allons encore une fois invalider le processus", a-t-il encore affirmé.
Entre 2008 et 2011, Goodyear a enregistré des pertes de 87 millions de dollars en moyenne par an, selon une porte-parole de la direction. Le groupe est endetté à hauteur de 3,4 milliards de dollars.
Des élus socialistes de Picardie ont demandé au gouvernement de "rejeter" la décision de Goodyear la jugeant "incompréhensible".
Le maire PS d'Amiens, Gilles Demailly, a demandé à rencontrer le Premier ministre et Arnaud Montebourg.
Outre Amiens-Nord, Goodyear compte quatre sites en France: Amiens-Sud (Somme, 938 salariés), Montluçon (Allier, 679 salariés), Riom (Puy-de-Dôme, 125 salariés), Rueil-Malmaison (338 salariés).