par Emile Picy
PARIS (Reuters) - Le Parlement français a adopté définitivement jeudi le projet de réforme pénale qui supprime les peines plancher introduites sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy et crée la contrainte pénale, une nouvelle peine en milieu extérieur alternative à la prison.
Après les députés la veille, les sénateurs ont entériné jeudi le texte mis au point par une commission mixte paritaire (CMP) Assemblée-Sénat. Le texte est donc définitivement adopté.
Le texte de la CMP est proche de la version votée en première lecture par les députés. Il revient sur plusieurs mesures ajoutées par le Sénat, comme la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs créés en août 2011.
Tous les groupes de gauche, y compris celui du Front de gauche, ont voté en faveur de ce texte présenté par la ministre de la Justice, Christiane Taubira.
L'UDI (centriste) a voté contre de même que l'UMP, qui, en accusant le gouvernement de "laxisme", a mené une longue bataille à l'Assemblée avec le dépôt d'environ 600 amendements sur un texte comptant une vingtaine d'articles.
"C'est un texte de protection de la société car au cœur du contrat social se trouve ce devoir de protection que l'Etat doit au citoyen", a déclaré Christiane Taubira.
Mais pour le député UMP Georges Fenech, "c'est une loi scélérate".
"Le gouvernement, imprégné d'une forte culture de l'excuse, nous propose de voter un texte dont la finalité est de réguler les flux pénitentiaires en ouvrant largement les portes de sortie de la prison et en cadenassant les portes d'entrée", a-t-il dit.
Les groupes UMP des deux assemblées ont annoncé qu'ils allaient saisir le Conseil constitutionnel.
Le texte supprime les peines minimales, dites "peines plancher", prévues pour les récidivistes et les auteurs de violences aggravées qui avaient été instaurées par la droite en 2007 et 2011.
DROITS DES VICTIMES RENFORCÉS
Le gouvernement estime que, face au "bilan négatif" de ces mesures, il convient de restaurer le principe d'individualisation des peines.
L'article 8 du projet de loi, adopté après de longs débats parfois au sein même de la majorité, comporte la mesure-phare de cette réforme : la contrainte pénale.
Le texte initial prévoyait que cette peine de probation s'applique aux faits passibles de cinq ans de prison au maximum.
Dans un premier temps, la commission des Lois de l'Assemblée avait adopté un amendement soutenu par Christiane Taubira visant à étendre cette peine à tous les délits (jusqu'à 10 ans encourus).
L'exécutif a fait savoir qu'il y était hostile et un compromis a été trouvé : la contrainte pénale sera réservée aux délits susceptibles d'être punis de cinq ans d'emprisonnement jusqu'au 1er janvier 2017, avant d'être étendue à tous les délits.
Des amendements du Front de gauche, des écologistes et des radicaux de gauche qui visaient à abroger les tribunaux correctionnels pour mineurs créés en 2011 sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy ont été rejetés.
Le Sénat a ensuite introduit cette suppression dans le texte, mais elle a disparu de la version mise au point par la CMP après l'engagement du gouvernement de présenter un projet de loi sur la justice des mineurs au début de l'année 2015.
De même ont été rejetés des amendements présentés par quelques socialistes, les écologistes et le Front de gauche qui visaient à supprimer la rétention de sûreté, une disposition mise en place en 2008 et qui vise les criminels condamnés à des peines d'emprisonnement d'au moins 15 ans et jugés toujours dangereux une fois leur peine purgée.
Le texte propose également de renforcer les droits des victimes et prévoit par exemple une "sur-amende" de 10% destinée à financer les associations d'aide aux victimes.
(Edité par Sophie Louet)