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L'Argentine tourne la page du "corralito", qui menace désormais l'Espagne

Publié le 01/08/2012 21:10

En remboursant vendredi les derniers porteurs de titres émis lors du gel des avoirs bancaires de la crise de 2001, l'Argentine va officiellement tourner la page du "corralito", un blocage des retraits bancaires qui semble aujourd'hui menacer une Espagne en pleine crise.

Ce fameux "petit enclos" ("corralito") argentin, qui allait déclencher le plus important défaut de paiement de l'histoire - 100 milliards de dollars (75 milliards d'euros) - fait aujourd'hui figure d'épouvantail pour une Espagne qui s'enfonce dans une crise bancaire sans précédent.

"Si nous ne voulons pas devenir comme l'Argentine, avec un +corralito+ et une inflation de 20 ou 40%, nous devons prendre les mesures nécessaires pour assainir nos comptes publics", a récemment lancé la présidente de la Communauté de Madrid, Esperanza Aguirre (PP, droite au pouvoir).

"Moi, je ne voudrais pas être l'Espagne aujourd'hui", avance sourire aux lèvres l'ancien ministre argentin de l'Economie, Roberto Lavagna (2002-2005), dans une interview à l'AFP.

Le père du spectaculaire rétablissement argentin, qui a permis au pays sud-américain d'enchaîner des taux de croissance "à la chinoise" après la crise, estime qu'on commet en Espagne "les mêmes erreurs que celles qui ont provoqué le +corralito+" en Argentine.

"Les politiques que l'Espagne met en place mènent droit à la récession", assure-t-il, en soulignant qu'il faut, au contraire, "des mesures de relance capables d'associer redressement économique et social et assainissement des comptes publics".

Un autre ancien ministre argentin de l'Economie, Ricardo Lopez Murphy, demeure en revanche convaincu que la seule manière d'éviter le gel des avoirs, c'est la rigueur. Son propre plan de rigueur avait été écarté en mars 2001 et il avait dû démissionner quinze jours après avoir été nommé.

"Nous aurions pu corriger le tir et éviter le coeur du problème: la panique et la fuite des capitaux", explique-t-il à l'AFP.

Il estime toutefois qu'entre l'Espagne et l'Argentine "il y a une différence essentielle: l'Europe contrôle l'émission monétaire" alors que l'Argentine voulait respecter coûte que coûte une parité instaurée par la loi: 1 peso = 1 dollar, mais sans en avoir les moyens.

"Nous avons été les Indignés de 2001"

Après un budget 2012 d'une rigueur sans précédent (27,3 milliards d'euros d'économies), le gouvernement espagnol a annoncé 65 milliards d'euros d'économies d'ici fin 2014, dont des coupes visant les fonctionnaires et les chômeurs, s'attirant la colère des manifestants.

"Nous avons été les Indignés de 2001", raconte dans ses bureaux du Congrès le sénateur Eugenio "Nito" Artaza (radical, opposition) en référence aux manifestants espagnols.

M. Artaza avait pris la défense de ceux qui ont vu leur épargne en dollars bloquée puis reconvertie en pesos, avec une perte de plus de 50% du montant initial.

Il appelle les manifestants espagnols à ne pas lâcher prise. "Nos droits, on doit les défendre par la résistance pacifique", affirme-t-il.

Ce sénateur déplore par ailleurs qu'en Espagne aujourd'hui comme il y a dix en Argentine, "l'Etat prenne à sa charge la dette des banques".

C'est pour empêcher la chute des banques que le ministre de l'Economie Domingo Cavallo, père de la parité peso/dollar, avait ordonné le 1er décembre 2001 le gel de tous les dépôts: soit près de 70 milliards de dollars.

Le gouvernement argentin avait ensuite émis des titres pour un montant total de 19,6 milliards de dollars (15,9 milliards d'euros), dont les derniers, pour un montant total de 2,3 milliards de dollars (1,86 milliard d'euros), seront remboursés vendredi.

"Nous finissons de rembourser le +corralito+ dans 1 jour, 19 heures, 36 minutes, 22 secondes", affichait mercredi le ministère de l'Economie sur son site officiel, ajoutant que "sans dette, nous sommes davantage libres".

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