Les salariés de l'équipementier canadien en télécommunication Nortel multiplient les actions pour dénoncer une "liquidation abusive" de la filiale française et obtenir des indemnités supra-légales, mais ont renoncé à leur menace de faire "sauter" le site.
Mercredi matin, les employés de Nortel ont en effet retiré la dizaine de bouteilles de gaz qu'ils avaient placées la veille sur le site de Châteaufort.
Une majorité d'entre eux sont en grève depuis une semaine et les rassemblements se succèdent (de Versailles en marge du Congrès au siège de Bouygues Telecom ce mercredi) malgré l'absence d'une culture syndicale forte dans l'entreprise.
"Les bonbonnes, c'était un acte symbolique fort pour dire qu'on nous poussait à l'extrême", a déclaré à l'AFP Christian Berenbach, délégué CFTC. "On est pas des terroristes ni des bandits, seulement les victimes d'une liquidation judiciaire programmée de longue date et d'un scandale financier", a-t-il ajouté.
Après les déboires du géant canadien, les salariés de Nortel Networks SA (680 salariés) de Châteaufort se retrouvent sous le coup d'une liquidation judiciaire et d'un plan social visant 467 personnes.
Le tribunal de Versailles a assorti, fin mai, sa décision d'une continuation d'activité, laissant la porte ouverte à des repreneurs qui doivent déposer leurs offres avant le 20 août.
Mais les salariés estiment que le temps presse car dès le 20 juillet, les élus du CCE doivent rendre leur avis sur le plan social qui prévoit, repreneur ou pas, 467 postes supprimés à Châteaufort, site de recherche pour la technologie sans fil.
Réunis en collectif, ils exigent des indemnités supra-légales de plusieurs dizaines de milliers d'euros et des mesures de reclassement car ils jugent que la maison-mère a "asséché via un pillage organisé la trésorerie de Nortel France".
"Entre 2001 et 2008, 312 millions d'euros sont partis de Nortel France à Nortel Canada dans le contrat de répartition des pertes et des profits. En début d'année" Nortel France a, de nouveau, versé "4 millions", a expliqué à l'AFP Farid Bazizi, un des représentants du collectif.
En janvier, le groupe Nortel a déposé le bilan au Canada et aux Etats-Unis pour pouvoir se restructurer.
Pour les filiales européennes, des membres du cabinet Ernst&Young UK ont été désignés comme administrateurs, mi-janvier. Fin mai, la justice française a aussi désigné un administrateur français.
"Au moment où Ernst and Young UK a pris le pouvoir, le 14 janvier, ils ont transféré 16 millions de la trésorerie de la France à l'Angleterre. Il reste 5 millions d'euros sur ce compte mais l'administrateur français ne peut pas y toucher", avance M. Bazizi.
Les salariés voudraient que ces 5 millions servent pour le plan social. Au delà des indemnités légales, une indemnité supplémentaire, conditionnée à la vente de certaines activités de Nortel, est proposée aux salariés, qui estiment cette mesure trop hypothétique.
Une nouvelle réunion de négociation était toujours en cours mercredi après-midi, tandis que le ministre de l'Industrie Christian Estrosi s'est rendu sur le site de Châteaufort et a salué "l'attitude responsable des salariés de Nortel".
Avec eux, il a évoqué le déblocage de crédits impôts-recherche et estimé que "l'enjeu (était) de sauver l'entreprise (...) qui a un véritable avenir dans la haute-technologie".