La Chine a annoncé vendredi un fort recul de l'inflation en février associé à un coup de frein de la production industrielle et des ventes de détail, autant d'indicateurs qui soulignent le ralentissement de la croissance de la deuxième économie mondiale.
La hausse des prix à la consommation s'est élevée en février à 3,2% sur un an, son plus bas niveau en 20 mois, selon le Bureau national des Statistiques (BNS). Les analystes interrogés par l'agence Dow Jones tablaient en moyenne sur 3,4%.
Le chiffre est aussi inférieur à l'objectif de 4% fixé par le gouvernement pour l'année 2012.
Après avoir réussi à contenir l'inflation qui avait culminé à 6,5% en juillet dernier et à 5,4% pour l'ensemble de 2011, le gouvernement chinois a graduellement assoupli depuis l'automne sa politique monétaire, pour soutenir l'activité.
L'inflation est un important facteur de mécontentement de la population, et potentiellement d'instabilité sociale, que le gouvernement chinois craint particulièrement en cette année de passage de témoin du pouvoir à une nouvelle génération de dirigeants.
"Une moindre pression inflationniste suggère que le gouvernement aura plus de marge de manoeuvre pour mettre en oeuvre des mesures sélectives d'assouplissement pour prévenir un ralentissement de la croissance", a réagi dans une note d'analyse Jing Ulrich, économiste de la banque J.P. Morgan.
La hausse du Produit intérieur brut (PIB) de la Chine s'est ralentie tout au long de l'année 2011, passant de 9,7% au premier trimestre à 8,9% au quatrième. Elle devrait continuer à décélérer au premier trimestre de cette année, selon les analystes.
Le ralentissement est confirmé par trois autres indicateurs publiés vendredi pour les deux premiers mois de l'année. La production industrielle a augmenté sur cette période de 11,4%, par rapport à janvier-février 2011, ce qui constitue la plus faible croissance enregistrée depuis juillet 2009.
Les ventes de détail n'ont elles progressé que de 14,7% sur les deux premiers mois de l'année, contre 17,1% de hausse l'an dernier.
Enfin les investissements en capital fixe dans les zones urbaines, qui contribuent pour plus de la moitié à la formation du Produit intérieur brut (PIB) chinois, ont augmenté de 21,5%, contre 23,8% en 2011.
En février, les prix à la production, un indicateur avancé qui permet d'anticiper l'inflation à venir, sont restés stables, a aussi indiqué le BNS. Une évolution jugée "inquiétante" par Alistair Thornton, économiste chez IHS Global Insight, qui estime qu'elle signale "un fort recul de la demande".
Cet analyste relève également que la hausse des prix en février est plus faible que les taux d'intérêt versés aux épargnants sur leurs comptes bancaires, ce qui pourrait "aggraver le recul du secteur immobilier", dans lequel les Chinois plaçaient leurs économies, mais qui connaît une baisse des prix depuis l'automne.
Malgré la multiplication des signes de ralentissement de l'économie, le gouvernement, qui a procédé en décembre et février à deux baisses des taux de réserves obligatoires des banques, hésite encore à assouplir plus nettement sa politique monétaire de peur d'attiser de nouveau une inflation à peine contenue.
Les cours mondiaux du pétrole, qui sont orientés à la hausse, pourraient aussi relancer la hausse des prix.
"Les prix du pétrole pourraient continuer à progresser en raison des tensions sur le programme nucléaire iranien et des inquiétudes sur les livraisons en provenance du Soudan, de la Syrie et du Yémen", selon Mme Ulrich, de J.P. Morgan.
D'autres indicateurs font état d'une croissance toujours très forte dans des secteurs clés de l'économie.
Les investissements des promoteurs immobiliers ont ainsi progressé de 27,8% sur un an au cours des deux premiers mois de l'année, selon le BNS, malgré le retournement du marché depuis l'automne.
Aussi le gouvernement devrait-il "rester prudent avant de crier victoire sur l'inflation", estime Brian Jackson, de la Banque royale du Canada, qui ne "s'attend pas à un grand changement d'orientation de politique économique à court terme".