Le déficit public français a reculé en 2018, s'établissant pour la deuxième année consécutive sous la barre des "3%", sur fond de croissance plus dynamique que prévu. Un motif de satisfaction pour l'exécutif, alors qu'un nouveau dérapage se profile pour 2019.
Selon une première estimation publiée mardi par l'Insee, le solde des comptes publics, mêlant le budget de l'Etat, celui de la Sécurité sociale et ceux des collectivités locales, s'est établi à 2,5% du produit intérieur brut, soit son plus faible niveau depuis 2006.
Ce chiffre est inférieur aux prévisions du gouvernement, qui avait dit en janvier s'attendre à un déficit public de 2,6%. Il s'affiche par ailleurs en baisse de 0,3 point par rapport au niveau de déficit atteint en 2017, revu à la hausse de 2,6% à 2,8% du PIB.
"C'est toujours mieux d'être à zéro", mais c'est "un point de PIB de moins" qu'en 2016 (3,5%), a souligné sur RTL le ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin. C'est "l'équivalent de plus de 10 milliards d'euros d'efforts réalisés", a-t-il ajouté.
Ce résultat, atteint à la faveur d'une croissance légèrement plus forte qu'attendu, à 1,6% au lieu de 1,5%, a permis à la dette publique de se stabiliser à 98,4% du PIB. Exprimée en chiffres bruts, la dette a néanmoins progressé, pour atteindre 2.315 milliards d'euros, contre 2.258 milliards en 2017.
"En stabilisant la dette publique et en réduisant plus que prévu notre déficit à 2,5% en 2018, nous avons mis fin à la dérive continue de nos finances publiques depuis plus de 10 ans", s'est félicité sur twitter le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, en promettant de "poursuivre le redressement" des comptes publics.
"Il faut continuer notre travail", a abondé Gérald Darmanin, en rappelant que les comptes publics avaient été dégradés l'an dernier par la reprise de la dette de la SNCF. "La dette s'est stabilisée, alors même qu'on a mis la SNCF à l'intérieur. Donc, en fait, elle a baissé", a-t-il jugé.
- "Le chemin de la décrue" -
Dans son projet de loi de finances initial, l'exécutif avait prévu une baisse du déficit plus ambitieuse, à 2,3% du PIB. Mais le ralentissement de l'activité, après une croissance à 2,3% en 2017, l'avait obligé à abaisser sa prévision à 2,7%, puis 2,6% du PIB.
Le recul du déficit à 2,5% montre "que la politique économique menée depuis 2017 porte ses fruits", ont insisté dans un communiqué commun, Bruno Le Maire et Gérald Darmanin. "Nos objectifs en matière de dépense publique ont été systématiquement respectés et même dépassés", ont-ils insisté.
Selon l'Insee, le poids des dépenses a reculé de 0,4 point pour atteindre 56% du PIB (54,4% hors crédits d'impôt), soit 1.318,5 milliards d'euros. Une baisse liée aux efforts accomplis par les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale, dont le déficit a été divisé par quatre à 1,2 milliard d'euros.
Les recettes, de leur côté, ont progressé de 2,3%, contre +3,8% en 2017, avec notamment une hausse de 6,2% des impôts sur le revenu. Le taux de prélèvements obligatoires a toutefois reculé de 0,2 point (45%), grâce à la baisse de la taxe d'habitation et à la suppression des cotisations salariales.
Une dynamique bienvenue pour le gouvernement, confronté à une équation budgétaire beaucoup plus compliquée que prévu pour 2019, qui pourrait donner lieu à des frictions avec Bruxelles.
En raison des mesures d'urgence annoncées face au mouvement des "gilets jaunes", Bercy a en effet dû relever à 3,2% sa prévision de déficit, déjà grevée par la transformation du CICE en baisse de charges, qui coûtera cette année 20 milliards d'euros aux finances publiques.
Selon plusieurs économistes, le dérapage pourrait être encore plus important: le gouvernement a en effet bâti sa prévision sur une hypothèse de croissance de 1,7%. Or cette dernière est désormais attendue à 1,4%, et reste sous la menace du ralentissement mondial.
Un retour ponctuel du déficit public au-dessus de la barre des 3% n'est "pas problématique", mais il faudra "que le chemin de la décrue des déficits et du recul de la dette reprenne son cours" après 2019, a prévenu le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici.