Après des mois de résistance, le gouvernement socialiste portugais, démissionnaire depuis le 23 mars, s'est finalement résolu mercredi à adresser une demande d'aide financière à la Commission européenne, invoquant l'"aggravation dramatique" de la situation financière du pays.
"Le gouvernement a décidé aujourd'hui même d'adresser une demande d'assistance financière à la Commission européenne afin de garantir les conditions de financement de notre pays, de notre système financier et notre économie", a annoncé le Premier ministre José Socrates, dans une allocution télévisée.
Cette demande d'aide a été aussitôt confirmée par le président de la Commission, José Manuel Barroso, dans un communiqué. Elle pourrait s'élever à environ 75 milliards d'euros, selon l'estimation faite fin mars par le président de l'Eurogroupe Jean-Claude Juncker.
Après avoir résisté pendant des mois aux pressions des marchés mais aussi de ses partenaires européens, José Socrates a justifié cette demande par le rejet au Parlement de son nouveau programme d'austérité qui avait entraîné sa démission et, a-t-il dit, "aggravé de façon dramatique la situation financière du pays".
M. Socrates a notamment rappelé les récentes dégradations de la note souveraine du Portugal par les principales agences financières et le renchérissement du coût des emprunts d'Etat, illustré mercredi par les taux records exigés par les investisseurs lors de la dernière émission de dette portugaise, de plus d'1 milliard d'euros.
"Je suis fermement convaincu que cela va encore s'aggraver si rien n'est fait", a ajouté M. Socrates.
"Comme vous le savez j'ai lutté toute l'année passée pour que cela n'arrive pas", a rappelé le Premier ministre démissionnaire. "J'ai toujours envisagé une demande d'aide extérieure comme une solution de dernier recours. Mais ne pas prendre cette décision comporterait des risques que le pays ne peut pas courir", a-t-il ajouté, alors que le Portugal doit rembourser d'ici la mi-juin plus de 9 milliards d'euros de dette.
Avant lui, le ministre des Finances Fernando Teixeira dos Santos avait reconnu la nécessité de "recourir aux mécanismes de financement disponibles dans le cadre européen" tout en soulignant que "cela exigera la participation et l'engagement des principales forces et institutions politiques".
Mercredi soir, le président de la Commission européenne a assuré que la demande portugaise "serait examinée le plus rapidement possible", les ministres des Finances de l'Union européenne se retrouvant vendredi à Budapest pour une réunion informelle de deux jours.
"Nous avons des instruments en place qui sont opérationnels, à savoir le MESF (Mécanisme européen de stabilisation financière) et le FESF (Facilité européenne de stabilité financière), pour lesquels les conditions d'accès sont claires et connues", avait auparavant rappelé le porte-parole de la Commission pour les Affaires économiques, Amadeu Altafaj.
Il avait toutefois insisté sur les "conditions" attachées à ces dispositifs mis en place au printemps 2010, à la suite de la crise grecque, et notamment la nécessité d'un "programme d'ajustement économique".
Le Fonds monétaire international (FMI) a affirmé mercredi soir qu'il se tenait "prêt" à venir en aide au Portugal, comme il l'avait déjà fait pour l'Irlande.
Après la démission du gouvernement de M. Socrates, le Parlement portugais a été dissous et des élections législatives anticipées convoquées pour le 5 juin.
Le chef du principal parti d'opposition de centre-droit, le Parti social-démocrate (PSD), a toutefois annoncé mercredi soir qu'il soutenait la demande d'aide financière, se disant prêt à "faciliter" les négociations que devra mener le gouvernement démissionnaire.
"Le PSD fera tout pour soutenir cette demande au plan extérieur, mais aussi pour faciliter les négociations que le gouvernement devra nécessairement conduire", a assuré M. Pedro Passos Coelho, donné favori par les sondages pour succéder à M. Socrates.