Plus économique que le train ou l'avion, plus reposant que la voiture, le bus longue distance connaît un essor fulgurant en Allemagne depuis la récente libéralisation de ce marché.
Qu'ils soient jaune soleil, vert pomme ou bleu électrique, les autocars aux couleurs criardes sont de plus en plus nombreux à sillonner régulièrement le pays grâce à l'ouverture à la concurrence des liaisons interrégionales en janvier 2013 pour encourager l'offre et rendre les tarifs plus accessibles.
Jusque-là, seule la compagnie ferroviaire allemande Deutsche Bahn et quelques sociétés de bus créées pour relier Berlin-Ouest à l'Allemagne de l'Ouest avant la Réunification y étaient autorisées.
Désormais, toute entreprise peut se lancer dans ce commerce pourvu que les liaisons assurées fassent au moins 50 kilomètres et que l'autocar roule au minimum une heure entre deux arrêts.
En une année, le nombre de liaisons a presque triplé pour atteindre 221, selon les chiffres du ministère des Transports.
Christoph Gipp, expert du secteur au sein de l'institut IGES, estime entre 10 et 15 le nombre d'opérateurs supplémentaires apparus sur ce marché "très dynamique". "Certains petits acteurs ont disparu et certains ont fusionné avec de plus gros, explique-t-il, par exemple avec MeinFernbus".
Cette start-up berlinoise, fondée par deux camarades d'études, s'est hissée à la première place avec une part de marché de près de 40%, selon l'IGES.
"La demande est forte, nos bus affichent régulièrement complet", déclare à l'AFP Torben Greve, l'un de ses cofondateurs. L'an passé, sa société a transporté 2,7 millions de passagers.
- Des prix attractifs -
Deutsche Bahn est le deuxième acteur du marché, devant les nouveaux venus comme ADAC Postbus, formé par l'automobile-club ADAC et le groupe de logistique Deutsche Post, ou encore FlixBus et DeinBus. Le britannique National Express s'est également engouffré dans la brèche sous le nom de City2City.
La compagnie ferroviaire a moins souffert qu'escompté de ces arrivées, souligne M. Gipp. En France, l'Autorité de la concurrence a d'ailleurs récemment appelé à une modification de la réglementation pour permettre le développement des autocars, jugeant que cela ne menacerait pas les trains de la SNCF mais viendrait plutôt combler les lacunes actuelles, au profit des consommateurs.
En Allemagne, les opérateurs promettent des sièges tout confort, une connexion wifi gratuite et offrent même parfois le café.
Mais leur principal atout reste leurs tarifs. "Grande ville. Petits prix. A partir de 8 euros", clame City2City sur son site internet. Chez MeinFernbus, traverser le pays du nord au sud pour se rendre de Hambourg à Stuttgart est possible à partir de 28 euros. Un aller en train coûte le double.
L'offre n'oublie pas les villes de taille moyenne comme Marbourg, dans le centre, ou Lübeck, au bord de la mer Baltique.
"Le bus longue distance est avant tout un concurrent de l'auto, il est utilisé par les gens voulant échapper au stress de la conduite ou par ceux qui y voient une alternative au covoiturage", explique M. Greve.
Ce mode de transport plaît aux étudiants mais aussi aux personnes âgées qui veulent éviter les correspondances parfois nécessaires en train, même si le trajet dure plus longtemps. "Sur certaines lignes, c'est aussi très attractif pour les actifs, par exemple de Fribourg à Munich", relève M. Gipp.
Les compagnies mettent également en avant l'aspect environnemental, arguant d'une consommation de carburant moyenne par passager moins élevée que la voiture.
-Une concurrence exacerbée-
Sur ce marché, encore très modeste par rapport à la circulation globale mais appelé à grandir, la multiplication des liaisons a entraîné "une très forte concurrence", admet M. Greve, qui affirme cependant que MeinFernbus se refuse à pratiquer des prix d'appel trop bas.
"Nous ne faisons pas partie de ceux qui proposent des trajets à 1 euro, nous ne trouvons pas cela raisonnable", assure-t-il, alors que sa société entend devenir rentable cette année.
Après l'éparpillement des débuts, le marché devrait se concentrer, pronostique Christoph Gipp. Une analyse partagée par Torben Greve, selon qui "il ne devrait rester à la fin que trois ou quatre entreprises de bus longue distance en Allemagne".