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En Espagne, des indignés du troisième âge contre le fisc

Publié le 23/08/2015 17:05
Le fisc réclame des arriérés d'impôts à des centaines de milliers d'émigrés rentrés au pays, en ne leur accordant souvent qu'un délai de 15 jours pour acquitter leurs dettes (Photo Joel Saget. AFP)

Le fisc réclame des arriérés d'impôts à des centaines de milliers d'émigrés rentrés au pays, en ne leur accordant souvent qu'un délai de 15 jours pour acquitter leurs dettes (Photo Joel Saget. AFP)

A l'approche des élections espagnoles, des retraités se mobilisent pour clamer leur indignation : ce sont d'anciens émigrés rentrés au pays pour y passer leurs vieux jours et qui sont rattrapés par le fisc.

Avec la crise économique de 2008, il a fallu par tous les moyens remplir les caisses de l'Etat. Depuis 2013, le fisc a découvert un nouveau filon. Il réclame des arriérés d'impôts à des centaines de milliers d'émigrés rentrés au pays, en ne leur accordant souvent qu'un délai de 15 jours pour acquitter leurs dettes.

"Ces personnes ont subi un grand préjudice moral et économique", s'indigne Eva Foncubierta, la présidente de la Fédération espagnole des émigrés retournés (FAER).

"Ces anciens émigrés ont beaucoup contribué au développement de l'Espagne et ils ne méritaient pas d'être traités ainsi", déplore cette Andalouse, dont les parents avaient émigré au Pays-Bas et se sont subitement retrouvés dans les filets du percepteur.

Mme Foncubierta estime à 800.000 le nombre de personnes concernées en Espagne, dont 145.248 ont déjà régularisé leur situation en remboursant un montant total de 309 millions d'euros au fisc, selon les chiffres publiés par le ministère du Budget à la fin juillet.

- Enchaîné devant les centres des impôts -

"C'est du vol et une injustice", dénonce Miguel Martinez, qui a travaillé à Paris de 1964 à 1974 et qui touche à ce titre une pension française de 330 euros par mois.

L'an dernier, il a eu la mauvaise surprise de recevoir une lettre recommandée qui exigeait le paiement d'arriérés d'impôts estimés sur cinq ans à quelque 5.000 euros, soit le tiers de ses revenus annuels cumulés.

"Avant je payais 85 euros d'impôts par an sur ma retraite espagnole de 11.700 euros. Avec les quelque 4.000 euros supplémentaires de France, ils ont bondi à 962 euros", affirme cet habitant de Callosa de Segura (Alicante, est), qui s'est enchaîné devant trois centres des impôts différents pour protester.

M. Martinez est d'autant plus furieux qu'il dit avoir en sa possession un écrit du fisc de 2011 certifiant que sa retraite française n'était pas imposable.

"Quand 800.000 personnes de cet âge-là sont concernées, il est difficile de croire qu'elles aient toutes décidé de frauder ensemble", dit Mme Foncubierta, qui regrette que le fisc ait plongé aussi brutalement les retraités dans les embarras financiers.

A l'image de Juan Antonio Pichel, qui habite en Galice (ouest), et qui s'est retrouvé dans l'obligation de verser 8.000 euros en deux semaines. "J'ai été contraint de faire un emprunt à la banque", reconnaît cet ancien émigré en Suisse.

Face à la menace, des associations de défense des anciens émigrés sont nées, principalement dans les régions à forte émigration comme l'Andalousie et la Galice.

Ces différents groupements ont obtenu un premier succès à l'automne dernier. Le fisc s'est engagé à ne plus imposer d'amendes pour retard et à rembourser celles déjà perçues, soit un total de 20 millions d'euros.

A la fin juillet, le ministère du Budget confirmait avoir rendu 13 millions d'euros d'amendes à 32.414 personnes. "Mais comme les personnes âgées devaient elles-mêmes entreprendre les démarches pour se faire rembourser, il reste 7 millions d'euros qui n'ont pas été réclamés", regrette Mme Foncubierta.

- Mobilisation avant les élections -

A l'approche des élections législatives de la fin de l'année, leur mobilisation reprend.

"Nous allons profiter de cette période électorale pour demander un traitement spécial", plaide Mme Foncubierta qui rappelle que les retraités espagnols ne sont imposables qu'à partir d'un revenu annuel supérieur à 22.000 euros à condition qu'ils n'aient qu'une source de revenus.

Or, affirme la présidente de la FAER, le fisc considère que les retraites de base et les retraites complémentaires, même en provenance d'un même pays, sont deux revenus différents, ce qui entraîne l'abaissement du seuil imposable à 11.200 euros.

"Nous demandons que les retraites soient considérées comme un revenu unique", explique Maruchi Alvarez, porte-parole d'une association galicienne.

En attendant, Mme Foncubierta adresse un conseil aux retraités qui envisagent de rentrer en Espagne: "vérifiez d'abord combien d'impôts vous allez payer. Vous pourriez avoir des surprises".

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