Le gouvernement grec affronte la double pression des marchés et de l'Allemagne poussant à une restructuration de la dette qui plombe la Grèce, et celle des syndicats qui protestent contre les nouvelles mesures d'austérité destinées à éviter cette même restructuration.
Depuis la publication d'études, en particulier celle de l'institut bruxellois Bruegel en février, estimant que la Grèce est devenue "insolvable" sous le poids d'une dette qui excède 150% de son PIB, les taux d'intérêt sur les obligations grecques ont progressivement monté jusqu'à atteindre des niveaux record ces deux derniers jours.
Mardi, la Grèce est parvenue à se refinancer sur les marchés à 4%, pour un emprunt obligataire à trois mois, qui n'a posé aucun problème aux investisseurs, car sans risque, puisque dans trois mois la Grèce bénéficiera toujours "du parapluie" de l'aide financière de la zone euro et du FMI accordée en mai 2010.
Mais, sur le long terme, il n'y a plus aucune confiance.
Ainsi, les obligations à deux ans ont poursuivi leur envol mardi au dessus de 20%.
En affichant ce taux usuraire, les marchés signifient qu'ils estiment que la Grèce dans deux ans sera incapable de se refinancer seule en émettant ses propres obligations à long terme, comme son gouvernement le souhaite. Sauf si le pays se déleste d'une partie du poids qui l'assomme en négociant un rééchelonnement des dates de remboursement, accompagné du non remboursement d'une partie du capital.
Plusieurs hauts responsables politiques allemands ont également été cités, allant dans le même sens.
Depuis son accession au pouvoir fin 2009, le gouvernement socialiste de Georges Papandréou --qui a dénoncé les déficits publics maquillés par ses prédécesseurs et procédé à un vaste nettoyage des comptes publics sous la surveillance de Bruxelles et du FMI--, s'est toujours opposé à cette hypothèse jugée périlleuse pour la Grèce et toute la zone euro, qu'il dément plusieurs fois par semaine.
En jeu, se trouve la survie des banques grecques qui détiennent énormément d'obligations, soulignent de nombreux analystes, mais aussi la santé des banques françaises ou allemandes, les plus exposées à la dette grecque.
M. Papandréou a d'ailleurs annoncé vendredi dernier un paquet de mesures supplémentaires d'économies budgétaires de 26 milliards d'euros d'ici 2015, dans l'espoir de prouver aux marchés que le pays sait désormais tenir les cordons de sa bourse.
Les nouvelles mesures s'accompagnent d'un plan de privatisations visant à lever 50 milliards d'euros d'ici 2015 pour combler la dette, et prévoient de nouveaux sacrifices notamment pour les fonctionnaires.
Mais ces mesures sont passées quasi inaperçues vendredi.
Ce week-end, le gouvernement grec a dû affronter des déclarations d'un ancien responsable issu de ses rangs, l'ex-Premier ministre socialiste Costas Simitis, architecte de l'entrée de la Grèce dans l'Euro au moyen notamment d'accords controversés avec la banque américaine Goldman Sachs. Il a lui aussi plaidé publiquement en faveur d'une restructuration de la dette.
Lundi, la Banque de Grèce a estimé que le pays peut s'en sortir seul (sans restructuration) à condition de respecter à la lettre tout le plan de redressement.
Dans son hypothèse la plus optimiste, la dette pourrait être abaissée à 100% du PIB en 2020, si toutes les mesures d'austérité et les privatisations annoncées sont menées à terme et si la croissance est plus élevée que prévue.
Mais la Grèce, dans sa troisième année de récession, fatigue. Les syndicats du public et du privé ont appelé mardi à une grève générale le 11 mai, contre l'austérité. A quelques jours d'un congrès européen de syndicats qui se tient à Athènes, où devraient être dénoncés le déshabillage de l'Europe sociale par les marchés.