A cinq mois d'une présidentielle qui devrait se jouer largement sur l'emploi, Nicolas Sarkozy a décidé jeudi de prendre politiquement en main le dossier PSA en promettant que la restructuration annoncée du groupe automobile n'entraînerait aucun plan social.
Sur fond de hausse du chômage, l'annonce mardi de la suppression de 3.500 emplois directs par le groupe PSA Peugeot Citroën a suscité une vive inquiétude chez les salariés, les syndicats et dans la classe politique.
Deux jours après, le chef de l'Etat a profité du 3e anniversaire de la création du Fonds stratégique d'investissement (FSI) pour assurer que les quelque 2.000 salariés menacés en France seraient "tous reclassés".
Signe de l'importance qu'il accorde à ce dossier, Nicolas Sarkozy a convoqué jeudi soir à l'Elysée le président du directoire de PSA Philippe Varin, en présence des ministres du Travail Xavier Bertrand et de l'Industrie Eric Besson.
Lors de cet entretien d'une demi-heure, le patron de Peugeot Citroën a répété au chef de l'Etat son engagement de ne procéder à "aucun licenciement, ni mesure d'âge" et à proposer à ses salariés "un reclassement", en vertu d'un "dispositif social exemplaire", a rapporté la présidence.
M. Varin a également promis que PSA maintiendrait en 2012 un effort de recherche et développement, l'un des principaux secteurs visés par son plan, d'un montant de 2 milliards d'euros.
N'étant pas actionnaire, l'Etat ne dispose sur le papier que de peu de moyens d'action sur le géant automobile. Mais, lors de son intervention jeudi matin, le président ne s'est pas privé d'adresser une mise en garde très claire à sa direction et, au-delà, aux autres grandes entreprises françaises.
"Prenons garde, chacun d'entre nous, à ne pas considérer que les emplois sont une variable d'ajustement", a-t-il lancé, "prenons garde à ne pas faire des choix qui soient caricaturaux, il y a aura beaucoup à perdre".
A la veille de 2012, tous les sondages placent l'emploi en tête des préoccupations des Français, avant sécurité, immigration ou nucléaire. Alors, celui qui en 2007 avait promis de "ramener le taux de chômage à 5%" reste déterminé, malgré la crise, à ne pas abandonner ce front à ses adversaires.
Nicolas Sarkozy s'est fait une spécialité d'intervenir dans les dossiers industriels délicats au nom de la défense de l'emploi, selon une pratique qu'il a inaugurée en 2004 avec le dossier Alstom.
Au terme d'une farouche bataille avec la Commission européenne, celui qui était alors le ministre de l'Economie avait arraché l'entrée provisoire de l'Etat au capital du groupe ferroviaire. Un succès qui lui permet de se présenter régulièrement en "sauveur" d'Alstom.
Au nom de cette jurisprudence, Nicolas Sarkozy s'est personnellement investi, depuis son élection, pour sauver des entreprises "stratégiques" qui menaçaient de réduire leurs effectifs, de délocaliser leur activité, voire de mettre la clé sous la porte. Avec des fortunes contrastées.
Dans l'automobile, il a convoqué Carlos Ghosn, le PDG de Renault dont l'Etat est actionnaire, lorsque l'ex-régie envisageait de délocaliser la production de ses modèles Clio en Turquie. Il s'est aussi dépensé sans compter pour garnir le carnet de commandes des ex-Chantiers de l'Atlantique.
En revanche, alors qu'il avait promis en 2008 aux salariés d'ArcelorMittal à Gandrange (Moselle) qu'il ne les laisserait "pas tomber", la moitié des 1.100 emplois du site ont aujourd'hui été supprimés. Et à Sandouville (Seine-Maritime), la production d'un véhicule utilitaire promise aux salariés de Renault se fait toujours attendre.
En septembre, la numéro un du PS Martine Aubry l'a rappelé à ses promesses non tenues en le sommant d'"agir enfin pour la sauvegarde de nos usines".
La CGT, premier syndicat chez PSA, a réagi jeudi sur le même ton aux assurances présidentielles. "Il n'y a peut-être pas de plan social (...) mais il y a bien des milliers de suppressions de postes dans le groupe", a commenté un de ses délégués, Jean-Pierre Mercier.