Malgré la mission confiée par le gouvernement à l'ex-président de La Poste Jean-Paul Bailly, la question du travail du dimanche a continué jeudi d'alimenter les débats, le ministre du Travail Michel Sapin n'excluant pas de légiférer sur cet épineux dossier, comme l'a réclamé le jour même la CGT.
Devant le Sénat, M. Sapin a estimé qu'il fallait "remettre de l'ordre" sur cette question, un serpent de mer revenu sur le devant de la scène après une série de décisions judiciaires.
Il a souligné que le gouvernement allait "le faire par la concertation", via la mission confiée à M. Bailly, qui doit faire des propositions fin novembre. Mais, a-t-il ajouté, "ensuite, le gouvernement prendra ses responsabilités. Si le Parlement doit être saisi, il le sera".
Le ministre a réaffirmé que le gouvernement était "attaché au maintien du principe du repos dominical".
Mais, a-t-il relevé, "il y a un énorme désordre aujourd'hui. Ce désordre, il a été créé par une loi, la loi Mallié de 2009", qui a assoupli les possibilités d'ouverture des magasins le dimanche. Une "mauvaise loi", selon M. Sapin, qui donne lieu aujourd'hui à "des décisions de justice qui constatent le caractère totalement inapplicable de manière ordonnée" de cette loi.
Le matin même, le secrétaire général de la CGT Thierry Lepaon avait réclamé une loi, précédée d'une concertation tripartite (Etat, syndicats, patronat).
Il a estimé que cette concertation devrait se dérouler "au niveau national", alors que la CFDT avait proposé lundi l'ouverture de négociations par branches dans le commerce.
De son côté, FO a indiqué qu'il s'engageait "à respecter un moratoire" sur les actions judiciaires sur ce sujet en attendant les conclusions de la mission Bailly, appelant les préfectures à geler de leur côté les autorisations d'ouverture.
Le syndicat avait été à l'origine de la procédure judiciaire qui a abouti à l'interdiction faite au groupe Bricorama d'ouvrir ses enseignes le dimanche. Le patron de cette enseigne de bricolage avait alors à son tour attaqué ses concurrents Castorama et Leroy Merlin pour "distorsion de concurrence", obtenant gain de cause la semaine dernière.
Dans la foulée, la décision de ces deux enseignes d'ouvrir 14 de leurs magasins franciliens dimanche dernier, alors que la justice leur intimait de les garder fermés, avait relancé de plus belle la polémique, alimentée par les protestations de certains salariés volontaires pour travailler en échange d'une majoration salariale.
Les deux enseignes ont d'ailleurs fait appel de cette condamnation, selon l'avocat de Bricorama. Pour ce dimanche, Castorama envisage de nouveau d'ouvrir, mais "sous réserve d'obtenir les autorisations nécessaires". Leroy Merlin n'a pas fait état de son côté de ses intentions.
Selon un sondage CSA pour Les Echos et l'Institut Montaigne, publié jeudi, elles seraient soutenues par la population en cas d'ouverture: huit Français sur dix (80%) estiment en effet que le gouvernement devrait "laisser les magasins de bricolage qui le souhaitent ouvrir le dimanche". Seul un sur cinq (19%) se dit opposé à cette mesure.
En outre, 66% des Français ont dit "approuver" ces deux enseignes de bricolage ayant "décidé d'ouvrir le dimanche malgré l'interdiction de justice", contre 33% d'avis contraire, selon un sondage Tilder-LCI-OpinionWay, également publié jeudi.