par Francesco Guarascio et Philip Blenkinsop
BRUXELLES (Reuters) - L'économie de la zone euro a bien débuté l'année avec une croissance supérieure à celle des Etats-Unis au premier trimestre, ce qui augure d'une performance solide pour l'ensemble de 2017, montre la première estimation publiée mercredi par Eurostat.
Dans un contexte politique délicat, cette amélioration des perspectives conjoncturelles pourrait priver d'arguments certains partis politiques eurosceptiques qui dénoncent la faiblesse des résultats économiques de la construction européenne et prônent un abandon de l'euro et le retour aux monnaies nationales afin de doper la croissance.
Le produit intérieur brut (PIB) des 19 pays ayant opté pour la monnaie unique a progressé de 0,5% sur la période janvier-mars par rapport aux trois mois précédents, un chiffre conforme au consensus des estimations des économistes interrogés par Reuters.
Par rapport au premier trimestre de l'an dernier, la croissance est estimée à 1,7%, là encore comme attendu.
Ces chiffres correspondent à une croissance de 1,8% en rythme annualisé (l'extrapolation du rythme d'un trimestre à l'ensemble de l'année) alors que le PIB des Etats-Unis n'a enregistré sur la même base qu'une expansion de 0,7% sur janvier-mars, sa plus mauvaise performance depuis le début 2014. [nL8N1I06LZ]
L'institut européen de la statistique a en outre revu en hausse la croissance du quatrième trimestre 2016, à 0,5% contre 0,4% auparavant, et à 1,8% en rythme annuel contre 1,7%.
"L'économie fait preuve de résilience face à l'incertitude, à la fois à l'intérieur et à l'extérieur. Sauf surprise à l'issue de l'élection présidentielle française de dimanche, la croissance de la zone euro est bien partie pour une bonne année 2017" a commenté Bert Colijn, économiste senior d'ING (AS:INGA).
LA REMONTÉE DES PRIX RESTE IRRÉGULIÈRE
La première estimation d'Eurostat ne détaille pas les différentes composantes du PIB mais les économistes estiment que la consommation intérieure et l'investissement des entreprises ont été les principaux moteurs de la croissance au premier trimestre.
Le poids de la demande intérieure dans l'activité globale pourrait d'ailleurs se traduire par un ralentissement de la croissance au cours des prochains trimestres en raison de la remontée probable des prix.
"Il est toujours possible que la croissance soit pénalisée par la réticence des consommateurs à dépenser si leur pouvoir d'achat est entamé par l'accélération globale de l'inflation et une croissance limitée des salaires dans la plupart des pays", explique ainsi Howard Archer, chef économiste Europe d'IHS Markit.
L'inflation dans la zone euro a atteint 1,9% en rythme annuel en avril selon la première estimation d'Eurostat, après 1,5% en mars, remontant tout près du pic de quatre ans atteint en février à 2,0%.
Mais les prix continuent d'évoluer en dents de scie: les chiffres des prix à la production dans la zone euro, également publiés mercredi, montrent ainsi un ralentissement en mars, avec une baisse de 0,3% sur un mois, qui ramène leur hausse sur un an à 3,9% contre 4,5% en février.
"Il semble que le ralentissement de l'inflation des prix à la production reflète pour une bonne part des effets liés à l'énergie, qui devraient continuer de peser sur l'évolution des prix à la production comme à la consommation jusqu'à la fin de l'année", explique Jack Allen, économiste Europe de Capital Economics.
Il ajoute que l'évolution irrégulière des prix devrait conduire la Banque centrale européenne (BCE) à laisser sa politique de soutien à l'économie inchangée jusqu'à l'année prochaine.
(Marc Angrand pour le service français)