Sous perfusion des banques centrales, le marché de la dette a connu une nette détente en 2013, mais la remontée des taux d'emprunts des États semble inéluctable en 2014 avec le tarissement programmé de leur soutien.Dans une économie en convalescence, la Réserve fédérale américaine (Fed) aura été la star de l'année. Les 85 milliards de dollars injectés chaque mois dans le circuit financier ont permis aux taux d'emprunts à dix ans des Etats-Unis, mais aussi des pays de la zone euro, de revenir à des niveaux plus confortables.Le taux de l'emprunt allemand de référence, appelé "Bund", s'est ainsi rapproché de son plus bas historique, à 1,152% le 2 mai, son homologue français inscrivant ce même jour un record à 1,659%. Ceux de l'Espagne et de l'Italie, qui s'étaient envolés au plus fort de la crise de la zone euro, sont aussi retombés sous les 4%. Jusqu'à ce que Ben Bernanke, le patron de la Fed, annonce qu'en raison des progrès de l'économie, un début de réduction de ce soutien pouvait être envisagé.L'été devait alors connaître une remontée brutale des taux.L'effet de cette annonce a été atténué par le statu quo observé ensuite par la Fed ainsi que par l'engagement de la Banque centrale européenne (BCE) à maintenir sa politique accommodante, avec notamment l'annonce surprise d'une baisse de son taux directeur en novembre.La situation a été "particulièrement difficile de début mai à début septembre, quand la Fed a commencé à parler de réduire ses achats d'actifs, car le marché a aussi conclu que cette réduction allait être suivie par d'autres pas, et notamment une hausse des taux". D'où un "effet très négatif sur le marché obligataire", relate Vincent Chaigneau, responsable de la stratégie obligataire à la Société Générale."Depuis, la Fed a fait des efforts considérables pour bien expliquer" qu'il s'agissait de "deux choses très différentes", ce qui a permis d'"enrayer le mouvement de forte hausse des taux longs", complète-t-il.La boucle a été bouclée avec la dernière réunion de la banque centrale américaine le 19 décembre qui a mis ses avertissements à exécution, en réduisant de 10 milliards de dollars ses achats.Les principaux bénéficiaires cette année ont été les pays plus fragiles de la zone euro, dont l'écart de taux ("spread") avec le Bund, est au plus bas depuis la crise de 2011.C'est une "très belle année pour l'Italie et spectaculaire pour l'Espagne", relève Axel Botte, strategiste obligataire de Natixis AM."Les investisseurs vont vers un début de normalisation" pour ces dettes, "même si nous sommes encore très loin des normes", juge également Frédérik Ducrozet, économiste du Crédit Agricole CIB.Avec un taux d'emprunt à dix ans inférieur à celui des États-Unis, la France est aussi "toujours vue comme" un des pays les plus solides en zone euro, explique M. Botte.Elle bénéficie en outre d'une "grosse épargne et du soutien des investisseurs domestiques en premier lieu les assureurs", souligne Patrick Jacq, stratégiste obligataire de BNP Paribas.une année de transitionLe défi pour 2014 sera de se passer des banques centrales, ce qui se traduira sans doute par un début de remontée des taux d'emprunt. Une tendance accentuée par la reprise, car ce marché refuge en temps de crise offre des rendements moins intéressants quand les investissements plus risqués comme la Bourse sont florissants.La situation semble désormais assainie: le Portugal a repris avec succès ses émissions de dette, l'Irlande est sortie du plan d'aide, l'Italie a retrouvé la stabilité politique, la Grèce a réduit son déficit et Chypre progresse rapidement."Pour 2014, nous prévoyons la poursuite de la remontée des taux américains", ce qui "traduit notre optimisme sur l'économie américaine, avec des prévisions de croissance supérieures à 3%", détaille M. Chaigneau. Côté européen, la remontée devrait être plus lente, "car nous pensons qu'en zone euro la croissance va rester faible à 0,6%".La reprise restant fragile, les banquiers centraux devraient néanmoins continuer à surveiller les marchés comme le lait sur le feu.Selon M. Botte, 2014 sera "une année de transition pour la Fed, car il faut préparer le marché à un retour à une politique de taux plus basée sur des données macroéconomiques. Le marché va devoir se réhabituer à cela, mais ce n'est pas un ajustement très difficile à faire".