La Réserve fédérale des Etats-Unis (Fed) s'est félicitée jeudi d'une consolidation des plus grandes banques américaines, alors même que certains de ses responsables s'inquiètent des risques que ces mastodontes continuent de faire peser sur l'ensembble du système financier.
"La capacité des plus grandes holdings bancaires du pays à résister à un scénario, hypothétique, d'une conjoncture extrêmement défavorable, s'est encore améliorée, et leur situation financière est dans l'ensemble nettement plus forte qu'avant la crise", a indiqué la banque centrale dans un communiqué.
La Fed a fait cette annonce après avoir soumis les 18 plus grandes banques américaines, qui représentent collectivement plus de 70% des actifs bancaires du pays, à de nouveaux tests de résistance, les troisièmes depuis le début de la crise financière en 2007.
Soumises à l'hypothèse d'une récession économique de deux ans d'une gravité sans précédent depuis la crise des années 1930, toutes sauf une, Ally Financial, en cours de restructuration sous la tutelle de l'Etat, sont parvenues à faire la preuve de leur capacité à maintenir leur ratio de fonds propres durs au-dessus des 5,0% réglementaires.
La Fed précise que selon ce scénario, le ratio de fonds propres durs ("Tier 1 Common Ratio", les fonds les plus solides, ndlr) de l'ensemble de ces 18 établissements passerait de 11,1% au troisième trimestre de 2012 à 7,7% au quatrième trimestre de 2014, et qu'il serait alors encore bien supérieur à son niveau de la fin 2008 ("environ 5,6%") au moment de la panique bancaire.
L'examen de la Fed montre qu'en dehors d'Ally, toutes les banques testées (parmi lesquelles les géants que sont JPMorgan Chase, Bank of America, Citigroup, Wells Fargo ou encore US Bancorp) parviendraient à maintenir un ratio de fonds propres durs qui serait conforme aux exigences des nouvelles normes internationales de renforcement du système bancaire dites de Bâle III, dont l'entrée en vigueur a été reportée sine die.
Gigantisme
En dépit de ce satisfecit, des voix au sein même de la Fed s'inquiètent des risques croissants que font peser sur l'ensemble du système financier la concentration bancaire et le gigantisme, phénomènes qui n'ont cessé de s'amplifier avec la crise.
Membre du directoire de la Fed, Jerome Powell a déclaré lundi que le projet de réforme de la finance, bien que "prometteur" sur ce point, prendrait "des années à réaliser" et que son "succès n'(était) pas assuré" au bout du compte.
Richard Fisher, président de l'antenne de la Fed de Dallas, est persuadé, lui, que sur ce point, la réforme échouera.
Il a répété le 27 février sa conviction selon laquelle seule une séparation hermétique entres les banques commerciales et les banques d'affaires permettrait de mettre fin au système actuel, à l'origine de la crise. Un système qui permet aux plus grandes banques de réaliser des paris insensés sur les marchés financiers, d'en empocher les gains, mais de laisser aux contribuables le soin d'éponger les pertes.
Egalement partisan de casser les géants de la banque, son ancien confrère Thomas Hoenig, aujourd'hui vice-président de la FDIC, organisme américain de contrôle du système bancaire, s'inquiétait en 2012 de ce que les normes de Bâle III "ne soient pas de nature à améliorer véritablement la stabilité financière".
Il reprochait notamment à l'exigence de ratio de levier ("leverage ratio") d'être trop faible pour empêcher les banques de s'exposer à des risques inconsidérés. D'après les résultats de la Fed, Goldman Sachs, banque emblématique des excès de Wall Street, serait la seule des banques testées à ne pas pouvoir maintenir ce ratio au niveau qu'imposera Bâle III (4,0%).