Le trafic était un peu moins perturbé vendredi pour le troisième épisode de la grève en pointillé à la SNCF, avec moins de conducteurs grévistes, mais les syndicats maintiennent la pression au lendemain d'une intervention télévisée d'Emmanuel Macron qui ne les a en rien rassurés.
De cet entretien, "on n'attendait rien et on n'a rien eu", a résumé Bruno Poncet, secrétaire fédéral de SUD-Rail, en marge d'une manifestation rassemblant plusieurs centaines de personnes - cheminots, étudiants ou enseignants - à Paris.
Cheminots en tête, brandissant des drapeaux SUD-Rail et CGT-Cheminots, les manifestants partis du métro Tolbiac, dans le quartier du site universitaire occupé depuis fin mars, se dirigeaient vers la gare d'Austerlitz.
Alors que les vacances scolaires de la zone C (Île-de-France, Toulouse et Montpellier) débutent dans la soirée, la SNCF a prévu un TGV et un TER sur trois, deux Transilien sur cinq et un train Intercités sur cinq.
Le taux de grévistes s'établissait dans la matinée à 22,5% selon la SNCF, mais 38% des personnels indispensables à la circulation, avec, dans le détail, 66% des conducteurs, 60% des contrôleurs et 29% des aiguilleurs, des chiffres tous en baisse.
En gare de Lille-Flandres, seuls quelques usagers attendaient leur train. Ancien cheminot, Gilbert Leriche, 58 ans, devait prendre un train pour Saint-Quentin (Aisne), où 200 cheminots ont manifesté dans la matinée. "Bien sûr que je les comprends. Nous en 1995 (...), nous nous sommes battus pour garder notre statut", raconte-t-il. "Si les gens trouvent qu'on a trop d'avantages, ils n'ont qu'à devenir cheminot".
Le président Macron a dit jeudi vouloir "aller au bout" de la réforme "indispensable" de la SNCF, qui "doit se réorganiser". Affirmant avoir entendu les syndicats, il les a appelés "au calme".
Le statut des cheminots? Ce "contrat" sera conservé pour ceux qui "sont rentrés avec" à la SNCF et même pour ceux qui seront transférés dans une autre entreprise après l'ouverture à la concurrence, a assuré le président. Donc, a-t-il poursuivi, "on leur dit juste d'accepter" la suppression du statut pour "les nouveaux" embauchés, dont les contrats seront basés sur "la convention" collective du transport ferroviaire, encore à définir.
A ce sujet, "pour sortir de l'ornière", Roger Dillenseger, de l'Unsa ferroviaire (2e syndicat à la SNCF), a réclamé vendredi sur RTL un "accord de méthode qui définira où et quand on va négocier" un "pacte social ferroviaire".
"Annoncer comme (M. Macron) l'a fait que seuls les nouveaux entrants seraient impactés" par la suppression du statut "est faux", avait rétorqué jeudi SUD-Rail (3e) car Élisabeth Borne, la ministre des Transports, et Guillaume Pepy, le patron de la SNCF, "ont tous deux confirmé la future abrogation du décret fixant le statut".
- Un président "hésitant" -
Le chef de l'État a par ailleurs indiqué que la dette de la SNCF de quelque 50 milliards d'euros sera reprise en partie "dès le début", puis le reste "progressivement", en fonction de l'avancée des réformes.
Interrogé vendredi, le délégué général de LREM Christophe Castaner a refusé de chiffrer la part de la dette que l'Etat reprendra, soulignant que l'Etat s'était engagé sur un "principe" et qu'il n'y avait "pas besoin d'avoir quelque chose de concret".
La CGT Cheminots (1er) a vu un président "hésitant", "qui ne maîtrise vraisemblablement pas le dossier de la réforme".
Quant à la CFDT Cheminots (4e), elle est "encore plus déterminée" à poursuivre la grève, même si Mme Borne a retenu "certaines de ses propositions", a indiqué son secrétaire général adjoint, Rémi Aufrère-Privel.
Le numéro un de la CFDT, Laurent Berger, a salué lui de "premières avancées" avec la prise en compte à l'Assemblée d'amendements portés par la CFDT cheminots, notamment sur l'ouverture à la concurrence. Tout en reconnaissant qu'"il y a eu des points actés dans la loi", M. Dillenseger a estimé qu'"on est très très loin du compte".
Le projet de loi de réforme ferroviaire fera l'objet d'un vote solennel mardi à l'Assemblée nationale.
Ce troisième épisode de la grève de deux jours sur cinq lancée début avril par le trio CGT-Unsa-CFDT s'achèvera dimanche matin. SUD-Rail a lancé une grève illimitée.