Les avocats de Jean-Marie Messier ont plaidé mercredi la bonne foi de l'ex-PDG de Vivendi Universal (VU) et l'absence de fraude de leur client lors de la débâcle du groupe en 2002, devant le tribunal de New York qui juge une plainte collective des actionnaires.
M. Messier avait dû quitter la présidence de VU en juillet 2002, après que l'entreprise eut perdu 13,6 milliards d'euros sur l'année précédente.
Ce procès public en action collective devant une cour fédérale, rare dans les annales judiciaires américaines, est intenté par les actionnaires du groupe, dont 60% sont français.
Les plaignants accusent VU --devenue depuis Vivendi--, son ancien PDG et l'ancien directeur financier Guillaume Hannezo, de les avoir ruinés avec une communication financière trompeuse entre 2000 et 2002: VU devenait un des plus gros groupes de médias au monde à coup d'acquisitions ambitieuses, et affichait des chiffres florissants alors que la société était surendettée et au bord du gouffre.
Après les plaidoiries des avocats de la société mardi, Michael Malone, avocat américain de M. Messier --présent à l'audience--, a longuement argué devant le jury mercredi de l'innocence de son client.
"M. Messier vient d'un autre pays (...), il vit depuis sept ans avec cette tache sur son honneur et sur son nom, et il est venu avec l'espoir de prouver que s'il reconnaît avoir fait des erreurs, il n'a en revanche jamais commis de fraude", a martelé Me Malone.
"Il arrive que nous nous fixions des objectifs, que nous travaillions dur, et que nous nous trompions", a poursuivi Me Malone, reprenant une des principales argumentations de la veille, selon laquelle la prise de risque, inhérente au monde des affaires, ne peut être assimilée à une fraude.
L'avocat a fait projeter sur un écran plusieurs mémos manuscrits rédigés en anglais, envoyés par M. Messier à ses équipes dès décembre 2000, et demandant des explications sur des résultats.
"Regardez ce mémo, daté du 24 décembre 2000, à la veille de Noël, M. Messier s'inquiétait de n'avoir pas de réponses à plusieurs de ses questions, cela vous montre combien il était dévoué au groupe et à son activité", a poursuivi l'avocat à l'adresse du jury.
Sur les 12 jurés qui assistent à ce procès depuis début octobre, aucun n'a de formation comptable approfondie. Après les plaidoiries, qui se termineront jeudi avec les conclusions des avocats des plaignants, ils devront décider s'il y a eu "faute", et s'il y a lieu de dédommager les centaines de milliers d'actionnaires.
Vivendi a d'ores et déjà annoncé son intention de faire appel en cas de verdict de culpabilité.
En France, le Tribunal de grande instance doit se prononcer le 13 janvier sur une demande de Vivendi d'exclure les plaignants français de l'action collective américaine. La société risque de devoir verser plusieurs milliards de dollars au terme du procès de New York, et le montant des indemnités serait considérablement réduit si les investisseurs français étaient exclus de la procédure.
Par ailleurs, Jean-Marie Messier et six anciens responsables de VU devraient comparaître devant le tribunal correctionnel de Paris entre le 26 mai et le 18 juin pour des malversations présumées au sein du groupe, a-t-on appris mercredi de source judiciaire. Les dates doivent encore être confirmées.
M. Messier a été renvoyé fin octobre en correctionnelle pour répondre des chefs de diffusion d'informations fausses ou trompeuses, de manipulation de cours et d'abus de biens sociaux, passibles de cinq ans de prison et de fortes amendes.