La justice a ordonné mercredi le redémarrage de la raffinerie Total des Flandres près de Dunkerque dans un délai de 15 jours, pour défaut d'information des représentants du personnel, une décision qualifiée de "victoire historique" par les représentants des salariés.
"Total a procédé à une fermeture provisoire de la raffinerie sans consulter le CCE (comité central d'entreprise). La société a ensuite transformé le provisoire en définitif et ouvert la consultation alors que l'usine était déjà fermée. La Cour a considéré qu'il y avait un +trouble manifestement illicite+", a expliqué Me Roger Koskas, conseil des salariés.
Dans son arrêt, la chambre sociale de la cour d'appel de Douai (Nord) estime que "la reprise de l'activité de raffinage est la seule de nature à mettre fin au trouble ainsi caractérisé".
La cour ordonne le redémarrage de l'usine, qui compte 367 salariés et environ autant de sous-traitants, dans un délai de 15 jours, sous astreinte de 100.000 euros par jour de retard.
Les avocats des salariés ont affirmé qu'il s'agissait de la première décision de réouverture d'un site industriel en France par la justice.
Charles Foulard, coordinateur CGT, a salué une "victoire historique", en menaçant d'un recours à la grève sur tous les sites si Total n'exécutait pas la décision de justice.
Selon lui, le redémarrage de l'usine arrêtée étant impossible rapidement pour des raisons techniques, Total devrait mettre en place des équipes de maintenance pour exécuter cette décision.
Philippe Wullens, délégué Sud (majoritaire sur le site), a parlé de "grande victoire", tout en estimant qu'il ne s'agissait pour l'heure que d'un "sursis".
Prenant acte de la décision, Total a fait valoir que la cour d'appel n'avait toutefois pas remis en cause la procédure d'information consultation autorisant le groupe à arrêter le raffinage sur le site. Face à ce "paradoxe", le pétrolier "va examiner dans les délais les plus brefs les moyens d'obtenir les clarifications indispensables".
Selon Me Roger Koskas, l'un des avocats des salariés, la décision de redémarrage ordonnée fait que cette procédure est "nulle".
Sur le site, où une cellule de reclassement a été mise en place mardi, les quelques dizaines de salariés présents se montraient satisfaits mais méfiants.
"Les organisations syndicales restent vigilantes, on ne réactive pas une activité comme ça juste pour éviter l'amende, d'autant que le montant de l'astreinte ne fait pas peur à Total", qui a fait 7,8 milliards d'euros de bénéfices en 2009, a souligné M. Wullens.
Total peut former un pourvoi en cassation, mais l'arrêt de la cour d'appel de Douai est exécutoire, selon Me Patrick Tillie, autre avocat des salariés.
En première instance, le tribunal des référés de Dunkerque avait condamné Total à verser 9.000 euros aux représentants des salariés au titre des frais de justice pour non respect de la procédure d'information, mais sans ordonner la reprise du raffinage.
Après des mois d'incertitude pour les salariés, le groupe pétrolier avait confirmé le 8 mars l'arrêt définitif du raffinage à Dunkerque, et annoncé un projet de centre d'assistance technique, un centre de formation, et un dépôt logistique et une unité de biocarburants.
L'installation d'un terminal méthanier avec EDF est également prévue, le ministre de l'Industrie Christian Estrosi ayant affirmé mardi qu'il devrait être "entériné" d'ici à la fin de l'année.