Les dirigeants de l'UE se préparaient jeudi soir à ouvrir la voie à un changement limité mais néanmoins risqué du traité de Lisbonne, condition posée par l'Allemagne pour accepter une réforme sans précédent de la zone euro suite à la crise grecque.
A l'issue de difficiles tractations, ils examinaient en fin de soirée un projet d'accord consistant à demander au président de l'Union européenne, Herman Van Rompuy et à la Commission, de mener "des consultations" en ce sens, selon un document obtenu par l'AFP.
L'objectif principal est la création d'un filet de sécurité permanent pour les pays de l'Union monétaire qui seraient en grande difficulté, comme la Grèce au printemps, avec le souci de rassurer les marchés. Un tel Fonds de soutien a été créé en juin pour seulement trois ans.
"Les Etats membres sont d'accord pour établir un mécanisme permanent de crise de la zone euro et invitent le président du Conseil européen (Herman Van Rompuy) à engager des consultations (...) sur un changement limité de traité nécessaire pour y parvenir", souligne le projet d'accord, susceptible d'être modifié.
Il est prévu que les dirigeants européens reparlent du sujet lors de leur prochain sommet en décembre, "dans l'objectif d'initier un changement de traité limité, afin que tout changement puisse être ratifié au plus tard d'ici mi-2013", date de l'expiration du Fonds de soutien actuel, ajoute-t-il.
Les partenaires de l'Allemagne ont signifié toute la journée qu'ils étaient ouverts à une telle idée.
Mais ils ne se lanceront qu'à contrecoeur dans cette nouvelle entreprise, par essence aléatoire, alors que l'encre du traité actuel de Lisbonne, qui a failli ne jamais voir le jour, est à peine sèche.
Ce texte laborieusement négocié et difficilement ratifié par l'Irlande et la République tchèque est en place depuis moins d'un an. Une modification nécessitera à nouveau une approbation des 27 pays.
Et même si les dirigeants européens espèrent que son caractère très limité évitera d'en passer par des référendums dans les Etats de l'UE, un accident de parcours n'est jamais exclu.
"Limité... certes, mais on sait très bien dans l'UE qu'un (processus) de changement de traité n'est pas limité" au vu de l'histoire, met en garde un diplomate européen.
Berlin craint, sans changement de traité, un blocage de sa Cour constitutionnelle car le traité de Lisbonne stipule qu'un pays européen ne peut être sauvé de la banqueroute par ses partenaires.
La chancelière allemande Angela Merkel a maintenu cette exigence jeudi.
"Nous, en Allemagne, sommes d'avis que nous avons besoin pour cela d'une modification des traités", a-t-elle déclaré.
Mme Merkel a aussi insisté jeudi pour introduire des "sanctions politiques", privant les Etats trop laxistes de droits de vote dans l'UE. M. Van Rompuy pourrait être aussi chargé d'examiner cette éventualité. Mais l'opposition des autres pays européens est telle qu'elle a peu de chance de voir le jour.
De manière plus consensuelle, les dirigeants de l'UE ont approuvé jeudi soir une réforme historique de leur discipline budgétaire commune pour tirer là encore les leçons de la crise de la dette en Grèce.
Il est prévu d'imposer de nouvelles sanctions contre les pays trop laxistes, qui s'appliqueront plus tôt et plus durement, même lorsque la limite européenne de déficit annuel de 3% du PIB n'est pas encore atteinte.
Les grands choix nationaux de politique économique seront surveillés de beaucoup plus près par Bruxelles, pour pouvoir tirer la sonnette d'alarme très en amont. Et les gouvernements pourront être punis non seulement si leurs déficits dérapent, mais aussi si le niveau de leur dette ne baisse pas assez vite.