La mairie de Lille souhaite "finir" Euralille, aujourd'hui troisième quartier d'affaires de France après La Défense et la Part-Dieu à Lyon, avec comme idée maître une "densification" réalisable grâce à une mixité logements/bureaux.
"Le grand objectif d'Euralille 3000 est de finir Euralille (...). Vingt ans après sa création, ce quartier doit se réinventer", lance Martine Aubry, maire socialiste lors d'une réunion publique dans une salle pleine.
A la fin des années 1980, l'emblématique maire de Lille Pierre Mauroy (1928-2013) remporte ce qu'il nomme "la bataille du rail" et parvient à arracher de haute lutte avec les Anglais une desserte TGV dans sa ville sur la nouvelle ligne Londres-Paris. Ancien "cul de sac" de la France, la métropole revendique sa centralité européenne entre Paris, Londres, Amsterdam et Bruxelles.
Le souhait de l'ancien Premier ministre est alors "d'édifier au-dessus de la nouvelle gare, donc au coeur de la Métropole, un centre d'affaires international qui soit à la fois une +turbine tertiaire+ capable d'entraîner toute la région et un nouveau quartier européen, insufflant un regain d'énergie à la ville".
De cette idée naîtra un programme ambitieux confié à l'urbaniste vedette néerlandais Rem Koolhaas, avec "une architecture puissante et audacieuse", selon Pierre Mauroy. Aussi, les architectes Christian de Portzamparc, avec la tour de Lille en "L" posée sur la gare TGV et Jean Nouvel, avec un centre commercial en forme de paquebot coiffé d'un impressionnant toit en porte-à-faux, donnent un nouveau visage à la capitale des Flandres.
Signe du succès d'Euralille, situé à une dizaine de minutes à pied du centre historique, "les surfaces de bureaux sont occupées à 95%", note Fabrice Veyron-Churlet, directeur opérationnel d'Euralille.
"Nous avons constamment des demandes d'entreprises souhaitant s'y installer", ajoute-t-il. "On n'est pas dans un village, et quand on vit dans une ville, il faut des logements et des emplois. Une ville, ça se construit!", tonne Mme Aubry.
- 'Polders métropolitains' -
Ce nouveau chapitre d'Euralille doit permettre de l'agrandir mais aussi d'en gommer certains défauts. Ainsi, à l'image d'autres quartiers d'affaires, Euralille perd de son animation à la nuit tombée.
D'où l'idée de rendre ce quartier "plus humain et plus vivant" afin de ne pas "refaire La Défense, avec des quartiers de bureaux et à côté des zones résidentielles" en privilégiant "une grande mixité de programmes", explique Martine Aubry.
Le projet d'Euralille 3000 prévoit la construction d'ici vingt ans de 130.000m2 de bureaux, mais aussi un millier de logements, des commerces, bars et restaurants ainsi que 5.000 m2 pour le sport, la culture et les loisirs.
Pour construire ces logements, Isabelle Menu, architecte urbaniste en charge du projet Euralille 3000, a prévu la création de "polders métropolitains", avec "des espaces non pas gagnés sur la mer mais sur des infrastructures routières", en l’occurrence le périphérique, qui "coupe" l'agglomération.
Autre idée forte du programme, améliorer la connexion entre les deux gares Flandres et Europe, qui possèdent le plus important trafic de France hors gare parisienne (25 millions par an), "à l'image d'un aéroport avec deux terminaux", dit-elle.
Reste l'épineuse question d'une grande tour, qui suscite toujours d'âpres débats en France, comme l'a montré la polémique concernant la tour Triangle à Paris. "Le marché ne permet pas économiquement de monter une grande tour pour une occupation privée", note Michel Bonord, directeur général d'Euralille, "mais ce n'est pas impossible", nuance-t-il toutefois.
Le calendrier d'Euralille 3000 a été présenté par la municipalité: étude d'impact cette année, modification du Plan local d'urbanisme (PLU) en 2016. La première phase du projet (pôle Euraflandres, extension du quartier d'affaires vers le sud, aménagement de nouvelles places) doit elle se dérouler de 2016 à 2020, tandis que la 2e phase (logements autour du parc Matisse et bureaux sur le Polder) doit avoir lieu de 2020 à 2030.