Après des mois de pression, l'équipementier nippon Takata a finalement décidé mardi de doubler à environ 34 millions le nombre de véhicules au total qui vont être rappelés aux Etats-Unis, en raison de ses airbags défectueux.
Cette annonce a fait plonger l'action du groupe de 12% mercredi dans les premiers échanges à la Bourse de Tokyo, à 1.375 yens. Elle a perdu plus de la moitié de sa valeur depuis début 2014, sombrant au fil des mois alors que l'affaire prenait de l'ampleur.
C'est le plus gros rappel de produits aux Etats-Unis depuis que le groupe pharmaceutique Johnson & Johnson avait en 1982 rappelé 31 millions de boîtes de comprimés Tylenol empoisonnés au cyanure.
Au-delà du cas américain, des millions d'autres voitures ont été convoquées au garage dans le monde pour la même raison, pour un total difficile à déterminer.
Takata n'était pas en mesure de fournir d'estimations à ce stade, selon un porte-parole interrogé à Tokyo. La firme, un des plus importants acteurs du secteur, est en train de faire le point avec les différents constructeurs automobiles, a-t-il précisé.
- Cause incertaine -
Le secrétaire américain aux Transports Anthony Foxx a fait état du retour chez les concessionnaires de quelque 17 millions de voitures supplémentaires à l'échelle du pays, qui viennent s'ajouter à une première vague de 17 millions.
Produits dans les années 2000, les airbags défectueux peuvent exploser, même en cas de collision mineure, et projeter des fragments de métal et de plastique sur les passagers, selon les autorités américaines.
L'agent gonfleur utilisé - du nitrate d'ammonium - est notamment susceptible de se détériorer en cas d'exposition à une humidité excessive, mais Takata a dit poursuivre ses tests pour identifier la cause exacte du défaut.
Pour la première fois, le groupe nippon a "reconnu" que ses équipements étaient défaillants. Selon des documents adressés à l'Agence américaine de la sécurité routière (NHTSA), Takata admet en outre que les airbags mis en cause peuvent laisser échapper de l'air.
Ces coussins de sécurité sont associés à "au moins cinq décès" sur le sol américain et à de nombreux blessés, a précisé le ministre. Le bilan total dans le monde, y compris les Etats-Unis, s'établit à six morts et 105 blessés.
"Depuis le début, notre but a toujours été simple: un airbag sûr dans chaque véhicule", s'est réjoui Mark Rosekind, l'un des responsables de la NHTSA. "Les mesures que nous prenons aujourd'hui sont des progrès importants pour atteindre ce but."
Saluant les bonnes dispositions de l'équipementier nippon, les autorités américaines ont décidé de suspendre la pénalité financière de 14.000 dollars par jour qu'ils lui avaient infligée en février pour refus de coopérer "totalement" avec la NHTSA. A ce jour, le montant des sanctions dépasse le million de dollars.
- Pénurie d'airbags -
Les réparations vont prendre des mois, voire des années avant d'être complètement effectuées d'autant qu'il y a une pénurie des pièces de remplacement.
La société japonaise, qui emploie plus de 43.500 personnes dans le monde et existe depuis plus de 80 ans, a décidé de doubler ses capacités de production, à 900.000 kits par mois à compter de septembre. Depuis janvier, Takata produit 450.000 kits par mois, contre 300.000 en décembre.
Le groupe nippon travaille aussi avec des concurrents pour répondre à la demande des constructeurs.
"Ce problème doit être résolu illico presto", a enjoint mardi Bill Nelson, sénateur démocrate de Floride (sud-est), un Etat dont les habitants sont particulièrement touchés par ces problèmes d'airbags à cause de la forte humidité présente dans la région.
Une dizaine de groupes automobiles sont concernés: BMW (XETRA:BMWG), Fiat, Chrysler, General Motors (NYSE:GM), Ford, Mazda, Mitsubishi, Nissan (TOKYO:7201), Subaru, Toyota (TOKYO:7203) et surtout Honda, qui a déjà fait revenir à lui seul 19,6 millions de véhicules à travers le monde chez ses concessionnaires, dont 5 millions jeudi dernier.
Le premier groupe automobile mondial Toyota en est lui à 8 millions de véhicules rappelés, et Nissan à 4 millions au total.
Outre la pression des régulateurs l'accusant de sa mauvaise gestion du scandale, Takata est visé par une enquête pénale du département américain de la Justice (DoJ), qui soupçonne l'équipementier d'avoir masqué le problème pendant des années.
Si son image en a pris un coup, les dégâts sur sa performance financière sont aussi importants. Il est tombé dans le rouge lors de son exercice fiscal 2014/15, accusant une perte de 230 millions d'euros.